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    Je vous invite à découvrir, dans la luxuriante campagne de l'Essonne, la Fête des plantes vivaces de Saint-Jean de Beauregard. Cet événement dédié aux amoureux des jardins s'est déroulé, du 21 au 23 septembre 2012, autour d'un élégant château, niché dans l'ancienne province du Hurepoix. Le prochain rendez-vous aura lieu les 12, 13 et14 avril 2013.

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    Je remercie Isa-Marie, du blog Grelinettes et Cassolettes, pour les invitations dont nous avons si joliment bénéficié.

    Si vous ne connaissez pas déjà Isa-Marie, vous pouvez lui rendre visite en cliquant sur ce lien. Son blog est un petit bijou de gourmandise et de créativité culinaire. Elle ouvre avec poésie les portes de sa bibliothèque et ses recettes sont toujours magnifiquement présentées...

    A l'occasion de cette nouvelle fête des jardins, elle propose de gagner des entrées alors si vous souhaitez connaître les modalités du jeu, il vous suffit de cliquer ici. Il reste encore quelques jours pour participer.

     

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    Le château de Saint-Jean de Beauregard fut majoritairement construit entre 1610 et 1760. Il domine un parc magnifique, composé d'un jardin à la française, d'un jardin à l'anglaise et d'un potager remarquable, classé Monument Historique.


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    (Photographie trouvée sur le site Jardins de France.)

    Le potager du XVIIe siècle, clos de murs, est conçu sur le modèle d'un potager médiéval. Il se compose de quatre grands carrés délimités par des allées bordées de fleurs qui symbolisent les fleuves du Paradis. Ces allées convergent vers un bassin central, représentation de la Source de Vie.

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    (Jardins de France)

    Ce lieu remarquable fut recréé en 1984 par Muriel de Curel qui s'inspira du Potager du Roi à Versailles, élaboré en 1678 par La Quintinie. On y découvre, au gré des saisons, des fleurs luxuriantes, une collection d'arbres fruitiers taillés en espalier ou en palmette, de nombreuses variétés de pommes et de poires, des serres à raisin et une chambre de conservation des précieuses grappes.

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    (Tourisme-essonne.com)

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    Une douce pénombre règne dans la chambre de conservation des raisins. Les murs sont tapissés de meubles de bois qui accueillent des fioles remplies d'eau. Dans chacune d'elles, on plonge le sarment d'une grappe et on cautérise l'autre côté de la tige avec une pointe de cire. L'eau reste saine grâce à un petit morceau de charbon de bois et le raisin se conserve ainsi jusqu'à Noël.

    Ce procédé fut inventé en 1848 à Thomery, en Seine-et-Marne, où l'on produit, depuis des siècles, un succulent chasselas doré.

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    Le chasselas de Thomery


    Rose Charmeux (1819-1899) mit au point ce mode de conservation des grappes de raisin, après leur cueillette, dans des petites bouteilles remplies d'eau. Le procédé, fort ingénieux, fut breveté en 1877. Il permet de maintenir la fraîcheur du raisin jusqu'aux fêtes de Noël et parfois même jusqu'à Pâques.

     

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    Le potager est bordé par un saut-de-loup, fossé qui assure la limite du jardin en s'intégrant parfaitement dans le paysage. Les lieux se composent, autour du bassin central, de quatre carrés eux-mêmes divisés en quatre par des allées fleuries. On y trouve une collection de légumes rares, des plantes médicinales et de savoureuses cucurbitacées comme la Courge Galeuse d'Eysines.

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    (graines-bocquet.fr)

     

    Cette variété de courge, appelée aussi « potiron ou giraumon brodé galeux », est originaire d'Eysines, près de Bordeaux. Elle est reconnaissable aux gales sèches liégeuses qui parsèment sa peau rosée. Sa chair orangée, délicieusement sucrée, a des saveurs très fines. Vous pouvez lire ici l'article qu'Isa-Marie lui a consacré.

    Outre les crosnes, les vitelottes à la peau bleue, les insolites petits pois carrés etc, voici l'épinard fraise (chenopodium capitatum), un légume-fruit que j'adorerais planter dans mon jardin si j'en avais un!

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    Cette plante insolite, originaire d'Asie, produit des petites baies rouges, juteuses et acidulées, qui ressemblent à des fraises et dont le goût rappelle celui de la betterave. Les feuilles ont une saveur de noisette. Elles se dégustent cuites ou en salade.

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    A l'instar de cet iris délicat, les fleurs sont suzeraines dans le potager.

     

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    L'envoûtante rose de Noël ou hellébore noir.

     

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    Les clématites « beautiful bride » et leurs atours de dames blanches.


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    Rêveuse...


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    Le château connut de nombreuses transformations au cours des siècles mais il a conservé son corps de logis central et ses pavillons de style Louis XIII, son bel appareil de grès, ses élégantes toitures et ses hautes souches de cheminées.


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    Le domaine fut restauré aux alentours de 1880 par le comte de Caraman, ancêtre des actuels propriétaires.


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    A l'extrémité des communs se dresse un remarquable pigeonnier construit en 1680, un des plus grands d'Île de France.

     

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    Cet édifice imposant, classé Monument Historique depuis 1993, est tapissé de 4500 boulins, espaces aménagés pour accueillir des couples de pigeons.


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    Le potager fournissait de la viande, des oeufs et de la colombine, excrément utilisé comme engrais dans le potager.


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    Doté d'une impressionnante charpente et d'une double échelle pivotante, de douze mètres de hauteur, il apparaît comme une vigie dans le paysage et un élément représentatif de l'art de vivre dans les demeures aristocratiques du XVIIe siècle.

     

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    Sous les grands arbres crépitants, la pluie suscite une atmosphère propice à des flâneries imaginaires.


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    Mais qui suis-je?


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    Une gourmandise végétale qui ressemble à un petit bijou: le Physalis, originaire des Amériques et appartenant à la famille des Solanacées.

     

    De très nombreuses plantes, dites de « sorcières » et composant des herbiers vénéneux, sont issues de cette fascinante famille. Les Solanacées regroupent des espèces alimentaires comme la pomme de terre, la tomate ou l'aubergine, des espèces ornementales comme le pétunia et des espèces riches en alcaloïdes, utilisées et redoutées pour leurs effets psychotropes, comme la mythique mandragore, la ténébreuse morelle, la pomme épineuse (datura stramonium) appelée aussi tabac du Diable, la très dangereuse belladone ou encore le tabac...

     

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    Les noms du physalis témoignent de la variété de ses espèces (une centaine environ): Amour en cage, pomme d'amour, lanterne chinoise, lanterne japonaise, lanterne vénitienne, coquerelle, coqueret du Pérou, groseille du Cap, mirabelle de Corse, herbe à cloques, herbe aux lanternes, cerise de terre, cerise d'Hiver, cerise des Juifs...

     

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    Certaines espèces sont toxiques mais d'autres sont gorgées de bienfaits et appréciées tout autant pour leur beauté que pour leurs baies comestibles. Les connaisseurs auront plaisir à déguster ce délicieux petit fruit nature, en confiture, en gelée, en tarte, avec du gibier ou à l'accommoder avec du chocolat fondu...

     

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    Une baie qui ressemble à une grosse cerise ou à une petite tomate, riche en vitamines C, A et B et fort appréciée dans la pharmacopée traditionnelle pour ses propriétés fébrifuges, anti-rhumatismales, rafraîchissantes, diurétiques et laxatives... Les tribus amérindiennes consommaient ces fruits d'or et les offraient à leurs divinités lors de certains changements de lune.

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    Dame Nature, une artiste magnifiquement inspirée...

     

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    L'amour en cage: une sculpture de chocolat en forme de physalis, dentelle voluptueuse et chic qui laisse entrevoir une perle rouge comme la passion...

     

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    Dans l'écrin de l'automne, des collections de plantes rares, des fleurs luxuriantes et des ornements pour le jardin sont rassemblés.


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    J'ai eu un coup de coeur pour les gracieuses terres cuites d'Une Maison en Toscane.  Image43  

    Depuis 2005, Une Maison en Toscane propose une sélection très élégante de terres cuites réalisées à la main, d'après des techniques de fabrication transmises de génération en génération. Je ne suis pas sponsorisée pour écrire à leur sujet. Je ne fais qu'exprimer mon admiration pour un savoir-faire qui a traversé le temps.


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    Ces terracotta sont originaires d'Impruneta, une petite ville entourée de collines boisées, située dans la région du Chianti, près de Florence. Elles sont façonnées à la main à partir d'une argile bleue appelée « terra turchina ». Grâce à cette argile riche en oxyde de fer, en sulfate de cuivre et en sels de carbonate de calcium, la terracotta résiste au gel et aux intempéries. Ses délicates couleurs s'étendent du rose à l'orangé et se patinent fort joliment avec le temps.


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    La technique de la terracotta naquit au Moyen-âge, entre Sienne et Florence, et s'imposa dans le décor des églises et des palais de Toscane à la Renaissance.


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    D'après l'artiste florentin Lorenzo Ghiberti (1378 ou 1381-1455), « l'argile est mère de tous les arts ».

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    Ce bas-relief en terracotta vernie, attribué à Donatello (vers 1386-1466), représente la Création d'Ève.Il est conservé au musée de l'Oeuvre du Dôme de Florence.

    La terre cuite d'Impruneta fut utilisée pour la réalisation du Dôme de la Cathédrale de Florence. Cette coupole, oeuvre de l'architecte Filippo Brunelleschi (1377-1446), est une merveille de solidité, de légèreté et de plasticité.

     

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    (Carte postale)


    Les terracotta d'Une Maison en Toscane offrent les remarquables propriétés physico-chimiques des terres cuites d'Impruneta.

     

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    L'Homme Vert, le Feuillu ou Green Man, figure hybride représentée, depuis l'Antiquité, sur de nombreux monuments. Il est formé d'un visage humain, encerclé ou tissé de feuillages. Il expire parfois des branches verdoyantes et peut arborer des cornes de fécondité ou des noeuds de serpent.


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    Réminiscence d'une très ancienne divinité de la forêt, il est le maître des cycles de la Nature et le gardien des mythes et des légendes...


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    Au Printemps et à l'Automne, la Fête des Plantes Vivaces de Saint-Jean de Beauregard constitue un rendez-vous horticole de première importance. On chemine parmi les fleurs et les arbustes luxuriants, le regard happé par les ornements indispensables à l'embellissement d'un jardin.

     

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    Un banc secret où le temps ralentit sa course, dans le doux murmure de la pluie...


    Image63.jpgDe mystérieuses cucurbitacées...

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    Je vous laisse admirer le stand de Grelinette et Cassolettes et imaginer une myriade de recettes avec la chair goûteuse de ces « créatures » végétales.


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    Avant de clore le premier chapitre de cette promenade, je ne résiste pas au plaisir de vous offrir un bouquet de couleurs et de parfums.


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    Le Rudbeckia automn glory, épanoui de début août à la fin octobre. De séduisantes fleurs solaires qui résistent vaillamment aux premiers froids, aux parasites et aux maladies.


    Image71.jpg Un bassin romantique orné de dahlias.

    Le dahlia est originaire d'Amérique Centrale et plus exactement des hauts plateaux du Mexique et du Guatemala. Il en existe plus de 40000 variétés, de formes et de tailles très diverses.

    Image72.jpg Il était cultivé par les Mayas et les Aztèques qui le nommaient «acocotli», c'est à dire «canne à eau».


    Image73.jpg Les roses d'automne composent une palette nacrée, à l'éclat d'aurore et de vermeil.

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    Merveilleuse, fragile et perlée d'eau céleste...


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    Entre lune pâle et sorbet grenadine...


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    …s'épanouit une belle nommée Cassandre...


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    Des jupons embaumés qui chuchotent entre les feuilles malachite...


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    Le baiser d'une rose, sucrerie veloutée qui s'offre sans retenue aux passionnés de nature et d'art du jardin...

     Je vous invite à découvrir, tout au long de l'année ou pendant les Fêtes des Plantes Vivaces, les charmes de Saint-Jean de Beauregard. Je vous remercie pour vos nombreux messages et votre fidélité sans faille et je vous dis « à bientôt » pour la suite de cette promenade.


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    Je n'ai pas été, les jours derniers, aussi présente que je l'aurais souhaité mais j'ai beaucoup pensé à vous. A l'orée du Printemps, mes forces reviennent peu à peu, j'espère les conserver le plus longtemps possible. Je vous embrasse bien fort...


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    Plume4

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    73 commentaires
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    « Tout l'Univers obéit à l'Amour;

                                                        Aimez, aimez, tout le reste n'est rien! » (Jean de la Fontaine)


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    Chaque année, à la mi-février, des rites d'amour et de très anciennes croyances fleurissent pour annoncer le réveil de la Nature, après le règne des sombres nuits d'hiver. Dans ce contexte, la date du 14 février est célébrée sous le patronage de Valentin, le saint des « fiancés, des jeunes filles et des garçons à marier » mais en dépit de son importante popularité, le personnage se pare d'une aura de mystère.

     

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    La légende de Saint-Valentin

    Plusieurs « Valentin » sont fêtés le 14 février, en France et dans d'autres pays, ce qui n'a pas manqué d'attirer l'attention des mythologues et des historiens. Une telle mise en lumière ayant généralement pour effet de «camoufler» un substrat de divinités pré-chrétiennes.

    On honore ainsi un prêtre de Rome nommé Valentin, un évêque de Terni en Italie, un évêque de Toro en Espagne, un confesseur du Puy-en-Velay et un martyr africain.


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    La légende de Saint-Valentin naquit sous le règne de l'empereur Claude II, dit le Gothique (214-270). En proie à certaines difficultés pour constituer ses légions, Claude fit interdire, en l'an 268, les fiançailles et les mariages sur l'ensemble du territoire qu'il dominait mais un prêtre nommé Valentin choisit de braver ses ordres et d'unir secrètement les jeunes couples. L'empereur le fit arrêter et condamner à mort par décapitation.

    Dans sa prison, Valentin rencontra Augustine, la fille de son geôlier, une jeune aveugle à qui il rendit la vue, grâce à des prières. Elle prit soin de lui et il lui adressa, avant son exécution, une lettre qu'il aurait signée «Ton Valentin».

     

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    Dans la Légende Dorée de Jacques de Voragine, Valentin fut emprisonné pour avoir refusé de se prosterner devant les divinités de Rome. Il s'éprit de la fille de l'empereur Claude, une jeune aveugle qu'il s'efforça de guérir. L'empereur promit de se convertir si l'issue était heureuse mais Valentin subit tout de même le martyre. Il laissa à la demoiselle de son coeur un billet doux qui devint une « valentine ».

     

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    Les Lupercales romaines

    Cette belle et tragique histoire a été façonnée dans un but politique et religieux, celui de « gommer » le souvenir érotique des Lupercales, fêtes de la fertilité célébrées jadis à Rome, le 15 février.

    Les prêtres de Lupercus, le dieu loup de la fécondité, couraient dans la ville, vêtus de peaux de chèvre. Ils fouettaient, avec des lanières en cuir de chèvre, les femmes qui croisaient leur chemin, afin de stimuler leur pouvoir de fertilité. La course sauvage des Luperques avait pour but de purifier la cité, d'éloigner les démons et les épidémies et de repousser les êtres atteints de lycanthropie.

     Lupercus était le protecteur des animaux à cornes, des troupeaux et des futures récoltes. On organisait en son nom une « loterie d'amour ». Les jeunes hommes tiraient au sort le nom de la jeune fille qui deviendrait leur « compagne des festivités » et sur laquelle ils veilleraient, l'espace d'une année.

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    En l'an 496, le pape Gélase Ier décida de contrer les survivances des Lupercales en instituant la Saint-Valentin. La fête romaine, tissée de coutumes païennes, disparut au profit de célébrations plus «convenables» mais il fallut attendre la fin du XVe siècle pour que, sur l'initiative du pape Alexandre VI, Valentin devienne le patron officiel des amoureux.

     

    Les amours des oiseaux


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    La Saint-Valentin est associée aux parades nuptiales des oiseaux qui commencent à s'accoupler et sont considérés comme les messagers du printemps. Au cours de leurs voltes amoureuses, ils se livrent à des jeux mêlés de chants qui stimulent l'éveil des puissances naturelles.

     

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    Ils accompagnaient dans l'Antiquité les Gamélies athéniennes, célébrations rituelles des noces de Zeus et d'Héra qui se déroulaient de la mi-janvier à la mi-février. On offrait à la déesse des oiseaux sacrés, d'un blanc immaculé, tandis que les fiancés échangeaient des voeux d'amour en buvant du vin dans des coupes en forme d'oiseaux.

     

    L'image des oiseaux a souvent été utilisée de manière symbolique pour représenter les élans de l'amour. Le verbe «oiseler», très employé au XVIIIe siècle, signifie d'ailleurs «faire l'amour».

     

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    Charles d'Orléans, le chantre de l'amour


    La tradition d'écrire des cartes de Saint-Valentin est étroitement liée à ce prince de France, neveu du roi Charles VI, qui naquit en 1394 et mourut en 1465. Charles Ier d'Orléans était le fils de Louis Ier, duc d'Orléans et de Valentine Visconti, fille du puissant duc de Milan, Jean Galéas Visconti.


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    Fait prisonnier à la bataille d'Azincourt, le 25 octobre 1415, il fut emmené en Angleterre et retenu captif à la Tour de Londres pendant vingt cinq années. Il sublima sa souffrance grâce à l'écriture de chansons, de ballades, de complaintes et de rondeaux. Il composa aussi des poésies en langue anglaise.


    Le thème de l'absence, la cruelle solitude alors que les oiseaux «apportent» le printemps, l'espoir qui veut survivre et l'amour ardent nous offrent un chant sublime, mêlé de fièvre et de noirceur. Le coeur à vif, le poète nous entraîne, avec les rougeoiements de sa plume, dans le cycle implacable et grandiose des saisons.

     

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    Le beau soleil, le jour Saint-Valentin


    Le beau soleil, le jour Saint-Valentin,

    Qui apportait sa chandelle allumée,

    N'a pas longtemps entra un bien matin

    Privéement en ma chambre fermée.

    Cette clarté qu'il avait apportée,

    Si m'éveilla du somme de Souci

    Ou j'avais toute la nuit dormi

    Sur le dur lit d'ennuyeuse pensée.


    Ce jour aussi, pour partir leur butin

    Les biens d'Amours, faisaient assemblée

    Tous les oiseaux qui, parlant leur latin,

    Criaient fort, demandant la livrée

    Que Nature leur avait ordonnée

    C'était d'un pair (1) comme chacun choisi

    Si ne me peux rendormir, pour leur cri,

    Sur le dur lit d'ennuyeuse pensée.

     

    Lors en mouillant de larmes mon coussin

    Je regrettai ma dure destinée,

    Disant: « Oiseaux, je vous vois en chemin

    De tout plaisir et joie désirée.

    Chacun de vous a pair qui lui agrée,

    Et point n'en ai, car Mort, qui m'a trahi,

    A pris mon pair dont en deuil je languis

    Sur le dur lit d'ennuyeuse pensée. »

     

    Envoi:

     

    Saint-Valentin choisissent cette année

    Ceux et celles de l'amoureux parti

    Seul me tiendrai de confort dégarni

    Sur le dur lit d'ennuyeuse pensée

     

    (1): « Pair » signifie compagne ou compagnon en français médiéval. Formé sur la même racine que le mot anglais « partner », il s'écrit aussi « per ».

     

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    Charles d'Orléans écrivit le rondel suivant pour sa jeune belle-soeur, Marguerite de Rohan.

     

    « A ce jour de Saint-Valentin

    Puis qu'êtes mon pair cette année,

    De bien heureuse destinée,

    Puissions-nous partir le butin!

     

    Menez à beau frère hutin

    Tant qu'ayez la pense levée

    A ce jour de Saint-Valentin. »

     

    Il rapporta la coutume de la Saint-Valentin en Touraine après sa libération d'Angleterre, en 1441, et la tradition des messages d'amour se répandit ensuite dans le reste du royaume et dans les cours européennes.

     

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    La vogue des « Valentines »


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    Au XIVe siècle, en Angleterre, il était courant d'écrire, le jour de la Saint-Valentin, des messages d'amour et d'amitié. Le poète et philosophe anglais Geoffrey Chaucer (1340-1400), auteur des Canterbury Tales (Les Contes de Cantorbéry) décrivit, en 1381, cette coutume dans le Parlement des Oiseaux (The Parliament of Fowles).

     

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    Chaucer relata, sous le patronage de Saint-Valentin, la cour empressée faite par le roi Richard II Plantagenêt à la princesse Anne de Bohême. Il initia par ses écrits la tradition des poèmes d'amour de la Saint-Valentin.

     

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    Le poète John Gower (1330-1408) réunit dans une de ses ballades les «trois monarques de l'amour»: Saint-Valentin, la Nature et l'Amour personnifié. Ces trois «Puissances» convoquent un «gouvernement d'oiseaux» qui choisissent leurs compagnes à l'occasion de la Saint-Valentin.

     

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    L'oeuvre de John Lydgate (1370?-1451?) s'inscrit dans la lignée de celles de Chaucer et de Gower. Dans Flower of Courtesy (lignes 10-14), le poète décrit l'origine des pratiques de la Saint-Valentin et invite les amoureux à célébrer avec fougue ce jour fatidique.

     

    « Awake, ye lovers, out of your slombringe,

    This glade morowe, in al the haste ye may;

    Some observaunce dothe unto this day,

    Your choyse ayen of herte to renewe,

    In confyrmyng for ever to be trewe. »

     

    Réveillez-vous, amants, de votre lourd sommeil,

    En ce joyeux matin, dépêchez, dépêchez ;

    Car la coutume veut qu’en ce jour,

    Le choix de votre cœur renouveliez,

    Et vous engagiez toujours fidèles à rester.

     

    Empreinte d'un charme raffiné, la poésie anglaise est à l'origine de nos cartes d'amour de la Saint-Valentin.

     

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    Dans la France du XVe siècle, les jeunes gens prirent l'habitude d'offrir à leur bien aimée des petits mots doux pour célébrer le retour du printemps mais il fallut attendre le XVIe siècle pour que les lettres d'amour soient joliment qualifiées de « valentines ».

     

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    Au XVIIIe et au XIXe siècles, de superbes valentines ornées de colombes, de coeurs, de roses et de Cupidons se répandirent dans l'Europe entière.

     

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    A l'époque victorienne (1840-1860), en Angleterre, elles furent imprégnées de parfums exquis et agrémentées de petits ornements de soie, de dentelle, de plumes, de rubans, de fleurs fraîches ou séchées.


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    Esther Allen Howland (1828-1904), la fille d'un célèbre papetier américain, lança, vers 1850, la production en série des cartes de Saint-Valentin.


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    Conçues comme de précieuses broderies, ces cartes suscitèrent l'engouement des collectionneurs.

     

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    La chromolithographie, procédé d'impression en couleurs mis au point par le lithographe Godefroy Engelmann (1788-1839) en 1837, contribua également, tout au long du XIXe siècle, à la diffusion des images de la Saint-Valentin.


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    Supertistions et coutumes de la Saint-Valentin


    Dans la France et l'Angleterre des XIVe et des XVe siècles, les jeunes filles choisissaient leur «Valentin», un cavalier courtois qui leur offrait des cadeaux et leur dispensait de galantes attentions.

     

    Le «Valentin» accompagnait sa «Valentine» à la fête des Brandons, le premier dimanche de Carême. Les futurs couples échangeaient des présents et des baisers autour d'un grand feu puis le «Valentin» allait «brandonner» à travers les champs et les vignes. Par ce geste à caractère magique, (il brandissait un bâton autour duquel crépitait un brin de paille enflammé), il stimulait la croissance des futures récoltes et attirait la prospérité sur les familles et les champs.

     

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    Afin de voir en rêve leur futur amoureux, les jeunes filles cueillaient, après les douze coups de Minuit, le 14 février, cinq feuilles de laurier. Elles en épinglaient une à chaque extrémité de leur oreiller et plaçaient la cinquième au milieu. Puis elles récitaient sept fois la prière suivante avant de s'endormir: « Ô grand Saint-Valentin, protecteur de ceux qui s' aiment, fais que je puisse voir en mon dormant celui qui sera un ami fidèle et un merveilleux amant ».

     

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    Une vieille coutume préconise de porter des crocus jaunes ou des jonquilles dans les cheveux au lever du soleil pour attirer l'époux de ses rêves.

     

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    Un autre rituel d'amour consistait à frotter doucement la surface d'un miroir avec un tissu rouge avant d'ouvrir la fenêtre et d'allumer deux chandelles rouges. On étudiait ensuite les formes qui se dessinaient à la surface du miroir, les taches de lumière, les cristallisations et les effets de givre, afin de connaître les secrets d'un futur époux.

     

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    Pendant des siècles, dans le Kent, en Angleterre, les jeunes filles fabriquaient un «homme de houx» et les jeunes hommes une «demoiselle de lierre». Ce couple végétal, mêlé de fleurs roses et bleues, était promené dans les rues et symboliquement marié avant d'être brûlé, avec les cadeaux de sa dot. Les cendres recueillies étaient répandues dans les champs pour stimuler la croissance des jeunes pousses.

     

    A Anvers, en Belgique, les jeunes filles recevaient de la part de leurs admirateurs des effigies du Greef, un personnage en speculoos ou en massepain. Le nombre de figurines à croquer qu'elles obtenaient était proportionnel à l'affection qu'on leur portait.

     

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    La divination par les oiseaux


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    Oracles de l'amour et du printemps, médiateurs entre les hommes et les esprits de la Nature, les oiseaux sont dotés de capacités surnaturelles au moment de la Saint-Valentin. Ils dévoilent dans les rêves des renseignements précieux sur la future épouse ou le futur mari. Ils font croître les bourgeons en battant des ailes. La tradition préconise de faire un voeu en tenant une plume ramassée quelques instants après le lever du soleil.

     

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    Le messager de l'amour, 1885, par Marie Spartali Stillman (1844-1927), artiste préraphaélite.

     

    Le rouge-gorge qui sautille dans la rosée ou qui agite un brin d'herbe évoque un mariage avec un voyageur ou un marin.

     

    La présence d'un moineau au petit jour près de la chambre augure d'un mariage d'amour.

     

    Le chardonneret signale à la jeune fille qui l'aperçoit qu'elle fera la connaissance d'un riche parti.

     

    Un vol de cygnes présage d'un mariage heureux mais un merle posé sur l'appui de la fenêtre annonce la venue d'un beau parleur.

     

    Deux colombes qui s'embrassent sous le gage d'une union prospère et sans nuages.

     

    La vue d'une mésange signifie que les époux auront de nombreux enfants.

     

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    Les symboles de la Saint-Valentin


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    (Carte de 1910)

     

    Le coeur, siège de l'amour, de la vie et de l'âme, organe des fluides et de la circulation sanguine, est le motif magique par excellence...

     

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    Le coeur percé d'une flèche évoque l'amour et la passion mais se présente aussi comme un symbole protecteur contre les dangers et les maléfices.

     

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    La rose rouge est un emblème de désir et de passion mais aussi un gage d'amour et de fidélité. La rose rose évoque la délicatesse des sentiments.

     

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    Chromolithographie ancienne de roses, 1894, par Francis Dubreuil et Madame Laurent Simons, trouvée sur le très joli site Roses anciennes en France.org.

     

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    Cupidon

     

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    (Fresque d'Annibal Carrache, au Palais Farnèse, 1595-1597).


    Incarnation antique de l'amour et du désir, Amour ou Cupidon, Eros en grec, est le fils d'Aphrodite, la déesse de l'amour et d'Arès, le dieu de la guerre. Cabotin, joueur, imprévisible et capricieux, il transperce les coeurs avec des flèches d'or ou d'argent. Son pouvoir est incommensurable. Il peut susciter l'amour aussi bien chez les hommes que chez les dieux.

     

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    Vénus et Cupidon, 1540-1545, par Agnolo di Cosimo dit Bronzino (1503-1572).

     

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    Redouté pour sa nature taquine et chaotique, il est souvent «puni» par sa mère mais il parvient toujours à s'échapper et à n'en faire qu'à sa tête...

     

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    Jeune fille se défendant contre l'amour, par William Bouguereau (1825-1905).

     

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    Cupidon à la rose

     

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    La Beauté couronnée par Cupidon

     

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    Cupidon adolescent

     

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    L'Amour mouillé, 1891, toujours par William Bouguereau, au musée des Beaux-Arts de La Rochelle.

     

    De l'union de Cupidon et de la ravissante Psyché est née une fille appelée Volupté.

     

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    Amour et Psyché, enfants, 1890, par William Bouguereau.

     

    Psyché aux ailes de papillon dont les larmes et le sourire font renaître la rosée.

     

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    Les mêmes, un peu plus âgés...

     

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    Psyché apparaît dans l'Âne d'Or ou Les Métamorphoses d'Apulée, célèbre philosophe antique né vers 123 ou 125 après J.-C. et mort aux environs de l'an 170.

     

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    Psyché,1904, par Guillaume Seignac

     

    Un roi grec de l'Antiquité avait trois filles dont Psyché, honorée pour sa resplendissante beauté. Les sujets du royaume se pressaient autour d'elle pour l'admirer et en oubliaient la dévotion qu'ils devaient à Vénus, la déesse de l'Amour.

     

    Ivre de jalousie, Vénus ordonna à Cupidon d'inspirer à Psyché de l'amour pour le plus laid et le plus méprisable des mortels.

     

    Cupidon s'envola pour exécuter les volontés de sa mère mais quand il aperçut Psyché, il fut tellement charmé par sa beauté qu'il se blessa avec l'une de ses flèches et tomba éperdument amoureux.

     

    Alors que ses sœurs épousaient de riches personnages, Psyché demeurait jeune fille. Le roi, fort contrarié, consulta un oracle qui lui ordonna de vêtir la princesse de noir et de l'abandonner au sommet d'une colline où une monstrueuse créature s'unirait à elle. Malgré son désespoir, le roi dut se résoudre à faire conduire sa fille adorée au lieu du sacrifice.

     

    Quand elle se retrouva seule, Psyché sentit qu'un souffle parfumé gonflait le tissu de sa funèbre robe. Zéphyr, le vent d'ouest, s'empara d'elle et la transporta jusqu'à une prairie verdoyante où elle s'endormit.

     

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    Psyché dans le jardin d'Eros,1904, par John William Waterhouse (1849-1917)

     

    Au matin, elle découvrit un palais somptueux, soutenu par des colonnes d'or et des voûtes d'ivoire et de bois de citronnier, décoré de bas-reliefs en argent et de mosaïques de perles et de diamants. Elle y pénétra, sous l'impulsion d'une voix mystérieuse qui l'invita à savourer des mets luxueux, à se glisser dans un bain délassant et à s'étendre, à la nuit tombée, sur un lit précieux où la rejoignit son époux...

     

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    Le bain de Psyché, 1879, par Frederick Leighton (1830-1896)

     

    Comblée après sa nuit de noces, Psyché connut des jours et des nuits de plaisirs intenses mais le souvenir de sa famille hantait son coeur et son esprit. Ému par son chagrin, son époux lui permit de rejoindre les siens quelques temps mais lui fit promettre de ne jamais chercher à contempler son visage.

     

    Elle retrouva ses parents et ses sœurs mais celles-ci, étonnées de son bonheur, s'efforcèrent d'insinuer le doute en elle, en affirmant que, dans l'obscurité, elle s'unissait très certainement à un monstre.

     

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    Psyché et ses deux soeurs par Jean-Honoré Fragonard (1732-1806)

     

    La nuit qui suivit son retour au palais, Psyché s'approcha de son époux endormi pour l'éclairer de sa lampe. A son grand soulagement, elle distingua les traits du plus séduisant de tous les dieux mais alors qu'elle s'émerveillait de sa découverte, une goutte d'huile bouillante tomba sur l'épaule de Cupidon. Réveillé en sursaut, il reprocha à la jeune femme d'avoir trahi sa parole et disparut.

     

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    Psyché levant sa lampe pour contempler Cupidon endormi,1737-1739, peinture appartenant au Cycle de l'Histoire de Psyché, réalisée par Charles-Joseph Natoirepour l'Hôtel de Soubise à Paris.

     

    Désespérée, Psyché le chercha aux quatre coins de la terre et finit, de guerre lasse, par envoyer des prières à Vénus.

     

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    L'Amour quittant Psyché,par Carle Van Loo (1705-1765).

     

    Ravie de pouvoir se venger, Vénus fit de Psyché sa servante et lui imposa une série de travaux rudes et humiliants mais aucune tâche ne semblait impossible à la jeune femme tant son amour lui donnait du courage et de la persévérance.

     

    Un soir, Vénus mélangea du froment, de l'orge, du millet, des graines de pavot, des pois, des lentilles et des fèves et ordonna à Psyché de trier chaque sorte de graine. Psyché vit alors une myriade de fourmis venir à son aide. Ces «filles de la terre» plongèrent dans le monticule de graines et classèrent l'ensemble par petits tas. Quand Vénus découvrit le résultat, elle réagit avec fureur...

     

    Elle ordonna ensuite à Psyché de traverser un bois sacré, bordé par une rivière, à la recherche d'un troupeau de brebis à la toison dorée et de lui rapporter un flocon de leur précieuse laine. Mais alors que Psyché s'approchait du troupeau, un roseau lui chuchota que les brebis étaient enragées. Il lui conseilla d'attendre que le soleil soit moins haut dans le ciel et de rejoindre un bouquet d'arbres dominant la rivière. La laine d'or, portée par le vent, s'y attachait en grappes scintillantes.

     

    Psyché revint saine et sauve auprès de Vénus. Très mécontente, la déesse lui ordonna de se rendre au sommet d'une montagne où de remplir un petit flacon avec de l'eau venant d'une mystérieuse source.

     

    Psyché trouva la source mais quand elle voulut remplir le flacon, de grandes mâchoires de pierre la menacèrent. Apparut alors un aigle royal, oiseau tutélaire de Jupiter, le roi des dieux. Il prit le flacon entre ses serres et le remplit. Psyché réussit l'épreuve et, une fois encore, Vénus fut prise à son propre piège...

     

    La déesse ordonna ensuite à la jeune femme de descendre dans les Enfers et de collecter, auprès de Proserpine, un peu de beauté enchantée dans un coffret.

     

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    Psyché par Paul Alfred de Curzon(1820-1895)

     

    Convaincue de devoir mourir pour entreprendre ce voyage, Psyché monta tout en haut d'une tour mais alors qu'elle allait sauter dans le vide, une voix résonna à travers les pierres de la tour. Elle lui révéla l'existence d'un chemin permettant d'entrer et ressortir vivante des Enfers. Psyché traversa le Styx sur la barque du nocher Charon, envoûta le féroce chien Cerbère et reçut des mains de Proserpine la boîte qui contenait la beauté des déesses.

     

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    Psyché obtenant de Proserpine l'élixir de beauté,1735, par Charles-Joseph Natoire.


    Mais dès qu'elle fut sortie des Enfers, une irrépressible curiosité s'empara d'elle. Elle ouvrit la boîte et une vapeur sombre et bleutée s'en échappa. Elle sombra alors dans une léthargie proche de la mort.

     

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    Psyché ouvrant la boîte,1903, par John William Waterhouse.


    Cupidon, emprisonné par sa mère en raison de ses noces clandestines avec Psyché, ressentit le drame qui arrivait. Il parvint à se libérer de sa prison et se hâta de la rejoindre pour la ranimer sous ses baisers.

     

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    Psyché ranimée par le baiser de l'Amour, 1793, sculpture d'Antonio Canova (1757-1822) musée du Louvre.


    Psyché remit la boîte à Vénus pendant que Cupidon implorait Jupiter de lui accorder son soutien. Jupiter accepta et convoqua le Conseil des Dieux. Psyché y parut, dans l'éclat de sa beauté, et but, devant la divine assemblée, une coupe d'ambroisie qui lui offrit l'immortalité. Les noces de Psyché et de Cupidon furent officiellement célébrées et Vénus accepta sa belle-fille...

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    L'Amour et Psyché,par Louis Jean-François Lagrenée(1724-1805).

     

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    Psyché et l'Amour, 1798, par le Baron François Gérard (1770-1837), musée du Louvre.

     Psyché, incarnation des premières émotions de l'âme, l'âme-souffle qui s'éveille à l'amour...


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    Les pouvoirs de Valentin

    A l'instar de Cupidon, Valentin s'efforce de réunir les amoureux mais il veille aussi sur la bonne santé morale et physique des couples. Il fut jadis invoqué pour fortifier le coeur, apaiser de nombreux tourments, soigner les rhumatismes et les douleurs récurrentes, faire tomber la fièvre et purifier le sang. En Belgique, il est considéré comme un protecteur contre les blessures et les hernies.

    Dans la région d'Hurtigheim, en Alsace, on trouve dans certaines chapelles des statuettes de Saint-Valentin, réputées apaiser les rhumatismes. Les personnes souffrantes offrent au saint une poule noire.

    Depuis fort longtemps, Valentin est le protecteur des nourrissons contre la mort subite. Il repousse les maladies qui touchent les animaux, détruit la vermine et garde les cultures contre les caprices de la météorologie.

    Il repousse la sècheresse et règne sur le vent comme en témoigne un vieux dicton du Centre de la France:

    « Jour de Saint-Valentin

       Vent au moulin ».

     

    Dans le vieux Nice, on avait coutume de dire:

    « Danse à la Saint-Valentin

       Soleil sur le chemin ».

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    Comme le fait remarquer Philippe Walter dans son ouvrage intitulé Mythologie chrétienne, Fêtes, rites et mythes du Moyen Âge, Valentin est un saint très mystérieux, fêté à la période du Carnaval et entretenant avec celle-ci des rapports très étroits. Il se présente comme la forme christianisée d'une vieille divinité pré-chrétienne « possédant la syllabe val dans son nom ou son surnom ». P.88. Sa décapitation s'inscrit, à l'instar de celle des géants de Carnaval, dans un cycle solaire et cosmique de mort et de renaissance.

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    Un village nommé Saint-Valentin

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    Au coeur du Berry, les « traditions valentines » ont fait renaître de ses cendres un charmant village, considéré, depuis plusieurs décennies, comme le fief des amoureux. La fête de la Saint-Valentin étant très appréciées au Japon, un jumelage a eu lieu entre le village français et le temple bouddhiste de Sakuto-Cho, en octobre 1997.

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    De nombreux couples viennent s'y marier et poser devant « le kiosque des amoureux » , érigé, par les Compagnons du Tour de France, en guise d'hommage à l'illustrateur Raymond Peynet.

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    Près du saule aux voeux, les visiteurs suspendent des feuilles en forme de coeur gravées de leurs noms, dans de grandes structures arborescentes de métal.

    L'emblème de la commune est le « coeur saignant » ou Coeur de Marie, de ravissantes fleurs bicolores qui dessinent des coeurs roses ornés d'une sorte de plumet blanc.

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    Les « Amoureux » de Peynet

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    Raymond Peynet (1908-1999) apprit les techniques du dessin publicitaire à l'École des Arts Appliqués à l'Industrie. Son diplôme lui fut remis par un des frères Lumière.

    Avec humour et sensibilité, il réalisa des étiquettes de parfums, des affiches, des encarts publicitaires, des dessins de presse et des décors de théâtre (notamment ceux du théâtre de la Huchette, dans le quartier Saint-Michel) mais il connut une célébrité mondiale avec ses «Amoureux», dédiés à son épouse et muse au nom prédestiné, Denise Damour.

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     Ces personnages délicats, nés sous le kiosque à musique de Valence, dans la Drôme, ont séduit un public considérable, à travers une profusion de livres et d'objets (écharpes, porcelaines fines, médailles, poupées, statues...). En 1942, Raymond Peynet écrivit à leur sujet: « Assis sur un banc, j'ai dessiné le kiosque qui se trouvait devant moi, avec un petit violoniste qui jouait tout seul sous l'estrade et une petite femme qui l'écoutait et l'attendait. On voyait aussi les musiciens qui, ayant rangé leurs instruments dans leurs étuis, s'en allaient dans le parc de Valence ».

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    Les Amoureux ont traversé les époques sans prendre une ride. Depuis l'époque de leur publication par Max Favalelli, dans le périodique Ric et Rac, leurs vêtements se sont adaptés aux évolutions de la mode et à la ronde des saisons. Ils sont accompagnés de symboles d'amour incontournables: le coeur, les roses, les angelots et les oiseaux.

     

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    Ils ont inspiré des chansons comme «Les bancs publics», créée par Georges Brassens et «Les amoureux de papier», composée par Charles Aznavouret chantée par Marcel Amont.

     

    Une de leurs statues se dresse à Hiroshima, au Japon, face au Mémorial de la Bombe Atomique.

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    Peynet peignit aussi des tissus et décora des ouvrages de Jean Anouilh, d'Alfred de Musset et d'Eugène Labiche, comme Le voyage de Monsieur Perrichonen 1939. Les amoureux de ses oeuvres pourront visiter quatre musées dans le monde qui lui sont consacrés: deux en France (Antibes et Brassac-les-Mines) et deux au Japon (Karuisawa et Mimasaka).


    Une longue tradition de cadeaux

    Dans l'ancienne Europe, à la mi-février, les rituels d'amour étaient accompagnés par des cadeaux: petites sculptures réalisées dans du bois d'arbres fruitiers, couronnes et bracelets de fleurs, coeurs et figurines de cire, moules à gâteaux, chansons, poèmes... A partir de la Renaissance et surtout au XVIIIe siècle, les gants, les bas, les éventails et les rubans décorés de perles, de plumes et de petits bijoux firent fureur. Les bouquets de fleurs, les cartes et le chocolat furent très appréciés à partir du XIXe siècle.

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    Chacun est libre de croire que la Saint-Valentin n'est qu'une fête commerciale, peuplée d'ornements kitsch et de babioles sucrées or cette fête s'enracine profondément dans notre folklore et les plus jolies attentions n'ont pas besoin d'être assorties d'une valeur marchande.

    En Italie, on offre des chocolats recouverts de noisettes appelés Baci Perugina qui contiennent des billets doux.

    Aux États-Unis, au Canada et au Japon, la Saint-Valentin est l'occasion d'exprimer son amour mais aussi de présenter ses voeux d'amitié. Les écoliers américains fabriquent des cartes qu'ils distribuent à leurs camarades, à leur institutrice, aux membres de leur famille et aux personnes qu'ils apprécient. Ils s'offrent aussi des petits sachets de graines qu'ils sèmeront pour célébrer le retour du printemps.

     A la Saint-Valentin fleurissent d'exquises gourmandises qui enfièvreront les papilles, à l'instar de ces petits trésors...

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    (www.lecacaotier.com)

     

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    La Maison du Chocolat...

     

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    Bien loin des lieux communs et du dédain que certains manifestent à son égard, la Saint-Valentin est une broderie de traditions passionnantes et complexes qui ne demandent qu'à être explorées. Je vous souhaite d'agréables moments de partage et de découverte ainsi que les opportunités d'exprimer votre amour, votre fantaisie et votre créativité, pas seulement l'espace d'une journée mais tout au long de l'année...

     

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    Joyeuse Saint-Valentin!

     

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    Bibliographie

    Constant BEAUFILS: Étude sur la vie et les poésies de Charles d'Orléans.Paris: A. Durand, 1861.Henri DONTENVILLE: Mythologie française. Paris: Payot, 1973.

    Claude GAIGNEBET: Le Carnaval. Paris: Payot, 1974.

    Arnold VAN GENNEP: Manuel de folklore français contemporain. Paris: Picard, 1947.

    Philippe WALTER: Mythologie chrétienne. Paris: Imago, 2003.


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    « C'est le coeur qui donne naissance à toute connaissance ». (Proverbe de l'Égypte ancienne.)


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    72 commentaires
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    Le 10 février 2013 marquera le début de la nouvelle année chinoise, l'année du serpent d'eau. Ce « maître séducteur » est réputé pour sa sagesse, son intuition et sa créativité débordante. Jusqu'au 23 février, sous son obédience mystérieuse, de nombreuses manifestations culturelles se dérouleront dans plusieurs arrondissements de Paris.


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    Programme des festivités


    Le dimanche 10 février 2013, vers 14 heures, un défilé traditionnel partira de la place de l'Hôtel de Ville, en direction du quartier du Marais. Le cortège empruntera la rue du Temple jusqu'à la place de la République et se dirigera, par la rue de Turbigo, la rue Beaubourg et la rue du Renard, vers la rue de la Verrerie.

     

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    Le dimanche 17 février 2013, à partir de 13 heures, le célèbre défilé du 13e arrondissement attirera des milliers de visiteurs autour de l'avenue d'Ivry. Le défilé de Belleville aura lieu le même jour, aux alentours de 11 heures.

     

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    Les mairies des 3e, 13e et 20e arrondissements proposeront, tout au long du mois de février, des conférences, des expositions de peinture à l'encre de Chine, des initiations à la calligraphie, des spectacles de marionnettes, des concerts et des projections de films. Les personnes intéressées pourront consulter le site Paris.fr.

     

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    Du 10 au 16 février, le théâtre du Châtelet accueillera pour la première fois en Europe l'opéra classique chinois Le pavillon aux pivoines. Cette épopée de 55 actes, composée en 1598 par le poète Tan Xianzu, a été adaptée par Tamasaburo Bando, maître japonais de kabuki, une forme de théâtre traditionnel né au début du XVIIe siècle. La version de l'acteur, considéré comme au Japon comme un « trésor national vivant », se déroule sur trois actes et six tableaux.

     

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    La romancière Lisa See reprend, dans le Pavillon des Pivoines, le thème de l'amour parfait développé dans le monumental opéra.

     

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    Le samedi 16 février, le nouvel an vietnamien sera célébré à la maison de l'Unesco. La « fête du Têt », appelée « Première Aurore », marque le renouveau du Printemps et le retour des âmes des ancêtres auprès des vivants.

     

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    Le serpent et le dragon étant liés, à bien des égards, dans la symbolique chinoise, je vous propose de voyager, sous l'égide du dragon d'eau, à travers les chatoyantes traditions du nouvel an asiatique.

     

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    Le 23 Janvier 2012, le Lapin de Métal s'en est allé, au profit d'une figure majeure de la mythologie chinoise, le Dragon d'Eau, seigneur du Zodiaque et des éléments. Avec fantaisie et majesté, il règne, dans ses rutilants atours, sur l'ancien monde et rayonne sur le nouveau. Le 10 février 2013, il sera remplacé par le Serpent d'Eau.

     

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    La Fête du Printemps est célébrée le premier jour du premier mois lunaire. Ses origines remontent à la dynastie Shang (1766-1122 avant J.-C.). Renouvelée, sous l'obédience du puissant dragon, elle promet, d'après les croyances asiatiques, prospérité, fécondité, succès et renaissance.

     

    Le nouvel an chinois évolue chaque année entre le 21 janvier et le 20 février, en raison du calendrier luni-solaire qui se fonde sur une connaissance aiguë des cycles saisonniers. C'est à Nankin, à l'observatoire de la Montagne Pourpre, que l'apparition de la nouvelle lune est déterminée.

     

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    Un défilé haut en couleurs

     

    Sur le parvis de l'Hôtel de Ville, les enfants du Dragon, les amateurs de folklore et de mythologie et les curieux de tous bords se donnent volontiers rendez-vous.

     

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    Le rouge et l'or, couleurs sacrées, protectrices contre les forces malveillantes.

     

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    Le rose du Printemps

     

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    Les génies de la chance et de la prospérité règnent sur ce festival lunaire.

     

    Le vert évoque la poussée de l'énergie vitale et le retour du Printemps. Associé à l'Est, au foie et aux muscles, il stimule la bonté et la santé.

     

    Le jaune est la couleur des vêtements impériaux et de la Terre, l'élément du Centre, symbole de fertilité. Les eaux du fleuve Jaune favorisent le renouveau de la végétation.

     

    Avec quelques touches de rose, le pouvoir de la Nature s'éveille doucement à travers les fleurs de cerisier.

     

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    Les somptueux costumes sont réputés stimuler les énergies bienfaisantes et « capter » l'attention des divinités mais les personnages fantastiques, les couleurs chatoyantes et les danses magiques ont surtout pour fonction de repousser Nian ou Nien, le « monstre de l'année ».


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    (Image Paris.fr)

     

    Ce monstre légendaire donna son nom au « cercle de l'année ». Émanation de l'incréé, du chaos et des abysses nocturnes, il rôdait autour des villages, à l'instar de nos croquemitaines et dévoreurs d'âmes occidentaux. Pendant la « nuit de Nian »,les habitants allumaient, au cours d'une veillée protectrice, une profusion de flambeaux.

     

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    Créature hybride, dotée d'une tête de lion et d'un corps de taureau, Nian apparaît dans les danses de lions qui neutralisent son pouvoir maléfique.

     

    Il surgit de la mer ou de la forêt. Il descend des montagnes pour dévorer les hommes et les animaux mais il est effrayé par le bruit des pétards, la lumière vive et la couleur rouge. Dans les temps anciens, les villageois plaçaient sur les portes des chiffons écarlates dans le but de l'effaroucher.

     

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    Les premiers pétards étaient réalisés avec des tiges de bambou. Aujourd'hui, ce sont des chaînes de petits pétards rouges appelés « démons » qui sont utilisées.

     

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    Émanation de la toute puissance du yang, la couleur rouge (hung), règne sur l'été et le sud, à l'opposé du yin, associé au noir, au nord et à l'hiver. Elle est apotropaïque, autrement dit réputée éloigner les forces négatives. (Le mot « apotropaïque » vient du grec apotropein qui signifie « détourner ».)

     

    « Au théâtre chinois, le dieu de la guerre a le visage peint en rouge, couleur du sang et des blessures, mais les cartes du nouvel an sont rouges et les pêches rouges sont un présent de mariage car le rouge est aussi la couleur de la joie et de la chance envoyées par les dieux. »

    J. Gernet: Problèmes de la couleur. Bibliothèque générale de l'École Pratique des Hautes Études, VIe Section, Sorbonne, 1957.

     

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    Le rouge est la couleur des noces. La jeune mariée, vêtue de rouge et installée dans un palanquin rouge, est conduite au logis de son époux. Les portes de sa nouvelle maison sont couvertes de laque rouge.

     

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    Les lanternes rouges et dorées sont des symboles de richesse et de félicité.

     

    L'ouverture des yeux du dragon


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    Avant que le dragon puisse danser, la tradition exige qu'on lui « ouvre les yeux » en peignant de rouge ses prunelles.

     

    D'après la légende, l'empereur Han Wudi, de la dynastie Liang, fit décorer le temple bouddhiste du bien-être, à Nankin, par le peintre Zhang Sengyóu.

     

    Au grand étonnement des visiteurs, Zhangréalisa quatre dragons dépourvus d'yeux. Il expliqua que les dragons s'envoleraient s'il leur peignait un regard mais face aux demandes réitérées de ses admirateurs, il dota de prunelles les deux premiers dragons. Il avait à peine terminé son travail que le tonnerre se mettait à gronder. Quelques instants plus tard, des éclairs déchirèrent le ciel et un déluge s'abattit sur le monastère. Les dragons aux yeux peints s'animèrent et s'envolèrent dans les nuages, comme de longs rubans de soie.

     

    Cette légende fut à l'origine du proverbe huà lóng din jingqui signifie « faire la tache des yeux du dragon peint »et décrit la dernière touche apportée à une oeuvre, la touche magique insufflant la vie.


    Les yeux du dragon auraient d'ailleurs été peints, dans les temps anciens, avec le sang d'une crête de coq, animal protecteur contre les démons et les esprits malveillants.

     

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    Les dragons qui virevoltent apportent la joie, la force et la prospérité. Leurs danses ondoyantes s'enracinent dans le culte des ancêtres, l'hommage aux divinités et la réminiscence du pouvoir impérial. Elles honorent aussi les dieux de la pluie fécondante qui font croître les moissons.

     

    Les acrobaties du dragon symbolisent la bravoure, la force et la noblesse. Tel un long ruban précieux, il se gorge d'air et tourbillonne parmi les passants émerveillés.

     

    La danse des Lions


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    Au rythme des cymbales, du gong et du tambour, les lions aux couleurs vives s'ébattent dans des positions qui mélangent la danse et les arts martiaux. Chaque lion est incarné par deux danseurs. Le corps et la queue sont animés par des liens souples alors que la tête est contrôlée par des tiges de bambou. Cette activité requiert une grande force, beaucoup de coordination et de vitalité.

     

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    Ces danses soigneusement codifiées sont réputées éloigner les esprits malveillants, attirer la chance et stimuler la fertilité. Elles sont exécutées pendant les mariages, à l'occasion du nouvel an et pour célébrer l'ouverture d'une boutique.

     

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    A l'origine, la danse des lions se déroulait à l'automne, après la période des moissons, pour exorciser les créatures démoniaques.

     

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    Ronde léonine autour d'un enfant qui accomplit des katas.

     

    Les Pouvoirs du Dragon


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    Le dragon chinois est une sorte de poisson mythique, doté d'un corps serpentiforme ou anguiliforme très étiré, de bois ou de cornes et d'une puissante gueule barbue. Il ne possède pas d'ailes mais la crête qui couronne son crâne lui permet de voler. Avant de revêtir sa forme définitive, il se métamorphose pendant des milliers d'années. D'après certains archéologues, son effigie dérive de représentations stylisées d'animaux bien réels, comme des poissons, des crocodiles et des serpents.

     

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    Un dragon poisson de bois que les moines frappent avec un bâton pour annoncer la prière ou la méditation.

     

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    Animal sacré, à l'instar du Phénix, de la Licorne et de la Tortue, le Dragon permet aux puissances célestes de se manifester auprès des Hommes.

     

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    L'expression « deng longmen » signifie « franchir la passe du dragon », c'est à dire « réussir sa carrière ».

     

    Si une carpe parvient à franchir la « porte du dragon », elle se métamorphosera en dragon. La « porte du dragon » est une porte mythique et allégorique symbolisant les efforts déployés pour atteindre son but.

     

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    Le Seigneur des métamorphoses

     

    Créature gorgée de magie, le dragon peut tisser les nuages, se changer en gouttes d'eau et en flammes, scintiller dans les ténèbres, devenir invisible, revêtir l'apparence d'autres animaux, prendre une forme humaine ou hybride (comme un corps d'homme et une tête de dragon).

     

    Le Dragon d'Eau


    Émanation de l'élément yang, le dragon est investi du pouvoir de création et de fécondité mais il est aussi en adéquation avec l'élément yin et les puissances aquatiques. Il est le seigneur des eaux en mouvement, fécondes et jaillissantes, dont il contrôle le pouvoir de vie et de mort.

     

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    Maître du calendrier et de la météorologie, il se love dans les eaux matricielles (rivières, lacs, océans) et règne sur les eaux célestes. Il serpente à travers les nuages et fait tomber la pluie.

     

    Les cours d'eau, les bras de mer, les étangs, les rivières et les lacs ont leurs dragons-esprits.

     

    Pendant l'hiver, les dragons s'enfoncent dans les entrailles de la Terre. Ils remontent à la surface au début du deuxième mois, pour apporter les pluies fécondantes. Le deuxième jour, ils sont honorés avec des feux d'artifice.

     

    Le rite du Qiu se déroule pendant les périodes de sécheresse. Pour invoquer le pouvoir bienfaisant du dragon d'eau, un dragon de papier est fixé à une armature de bois et placé dans un lit de rivière asséché. Les chamanes lancent des incantations et frappent des tambours pour imiter le grondement du tonnerre, invitant, par ce bruit caractéristique, le roi-dragon à libérer la pluie.

     

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    Dragons noirs dans les nuées, XIIe siècle

     

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    Les combats et les accouplements de dragons font aussi venir la pluie. Ils sont symbolisés par les « joutes des bateaux dragons ».

     

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    Les oeufs de dragons, brillants, nacrés, multicolores, iridescents, naissent des souffles mêlés des dragons mâles et femelles, sur les berges des rivières. Ils peuvent contrôler la météorologie.

     

    Le Sculpteur de paysages

     

    Le dragon représente les forces changeantes de la Nature, la mutation des espaces au rythme des saisons, les ondulations étranges des roches et de la terre.

     

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    (Photographie de Marie-Louise Baux trouvée sur Linternaute.)

     

    Les montagnes et les collines ont été façonnées par le passage ou le souffle incandescent des dragons. Les très vieilles pierres sont associées à leurs dents et à leurs os.

     

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    Le Seigneur de la végétation


    Les dragons verts incarnent la force contenue dans les graines et les bourgeons, l'énergie sinueuse des feuilles et des branches. Ils crachent des bouquets verdoyants.

     

    A la période du solstice d'hiver, ils combattent, de manière rituelle, et leur sang noir et jaune se répand sur la terre pour que renaisse le printemps.

     

    D'après la légende, le jade est né de l'union de la semence du dragon avec la terre, au moment où pulsent les énergies printanières.

     

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    Dragon de jade, 2200-1750 avant J.-C.


    Le magicien des éléments


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    De nombreux dragons engendrent les nuages avec leur haleine et tissent entre leurs griffes la brume et les phénomènes atmosphériques vaporeux. Liés au vent, aux orages fécondants et au tonnerre, ils peuvent provoquer des cyclones et des tsunamis.

     

    Ils ont aussi une incidence sur les heures du jour et de la nuit. Un dragon crée le jour en ouvrant les paupières et ferme les yeux pour appeler l'obscurité.

     

    Certains dragons suscitent des éclipses en poursuivant la lune et le soleil.

     

    Le médiateur entre les mondes


    A certaines périodes, les dragons sont chevauchés par les âmes qu'ils emportent dans l'au-delà.

     

    Dans les régions montagneuses, des bannières dragons claquent au vent pour attirer les bons esprits.

     

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    Quand il ne conduit pas les âmes vers les mondes célestes, le dragon poursuit une grosse boule brillante, jaune et dorée, qui symbolise le renouveau, la graine de lotus, émanation des nourritures terrestres et spirituelles. (La photo est un peu floue mais je me suis retrouvée contre la tête du dragon et j'en étais très heureuse...)

     

    Le Dragon et la Perle


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    Au creux de sa gorge ou de sa bouche, entre ses griffes ou dans un luxuriant palais situé au fond des mers, le dragon protège la perle sacrée, emblème de la « parole précieuse ». Des intrépides tentent parfois de la dérober car elle a la réputation d'exaucer les voeux.

     

    Quand deux dragons jouent avec une perle, celle-ci incarne « la balle du tonnerre ». En montant très haut dans les airs et en roulant brusquement sur le sol, elle attire les pluies fertilisantes et stimule le réveil de la Nature.

     

    D'après la croyance populaire, en Chine, le tonnerre féconde les coquillages et les perles s'y développent, gorgées de clarté lunaire.

     

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    Symbole de sagesse et de connaissance, de chance et d'immortalité, la perle est bénéfique pour le sang et les yeux. La tradition voulait qu'une perle soit placée dans la bouche des défunts fortunés.


    L'Empereur Dragon

     

    Le dragon apparaît comme l'emblème du pouvoir harmonieux, celui de l'Empereur, fils du Ciel et de la Terre et médiateur entre les « différents plans de réalité ».

     

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    L'empereur T'ai Tsung de la dynastie des Tang (626-649).

     

    Le dragon à cinq griffes était représenté sur les vêtements impériaux, les murs des palais et les objets à caractère rituel ou décoratif.

     

    Pour l'anecdote, le dragon à quatre griffes est un des symboles de la Corée et le dragon à trois griffes, d'inspiration Japonaise.

     

    Le Gardien de l'Ordre cosmique

     

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    Un gu ou tambourin, orné d'un dragon.

     

    Reflet de l'harmonie du cosmos, la musique tisse un lien subtil entre les mondes. Les cloches possèdent un anneau de suspension en forme de dragon.

     

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    Ces dragons représentent les cinq éléments de la cosmogonie chinoise: le bois (vert), le feu (rouge), la terre (jaune), le métal (blanc) et l'eau (noir), reliés par des cycles complexes. (L'illustration est issue du livre intitulé Voies et vertus de la médecine chinoise de Jean-François Cludy et Régine Tiburce-Cludy, P.21).


    Le chiffre du Dragon


    Il s'agit du chiffre neuf, quintessence de sagesse et de chance.

     

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    Un des dragons du Mur des Neuf Dragons de la Cité Interdite.

     

    Sur ce magnifique mur, construit en 1774, sous le règne de l'empereur Qian-Long et composé de 270 carreaux de céramique vernissés, ondulent neuf dragons sacrés, protecteurs du sanctuaire impérial contre les esprits maléfiques. Sur un fond tourbillonnant de vagues et de nuages, les dragons cherchent à attraper la perle céleste.

     

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    Une immense variété de Dragons


    Les dragons chinois sont de puissantes divinités, des rois des mers, des gardiens de trésors et de lieux sacrés, des médiateurs entre les mondes, des fondateurs de temples et de cités. Ils insufflent l'étincelle de vie, règnent sur les eaux célestes et matricielles, propagent la sagesse des dieux et des ancêtres. Le plus souvent bienveillants, ils possèdent un tempérament ombrageux, versatile et capricieux et transforment parfois les ondes telluriques en fluides mortifères mais cette part sauvage et chaotique de leur caractère n'affaiblit pas la vénération qu'ils suscitent.

     

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    Tian-lung est le dragon céleste, le protecteur des palais divins qu'il soutient avec sa colonne vertébrale.

     

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    Shen-lung est un magnifique dragon, doté d'écailles azurées. A partir de la dynastie des Han (206 avant J.-C. -220), ce dragon bleu ou bleu-vert se présente comme le symbole de l'empereur et de l'Orient, de la pluie printanière et du soleil levant. Il règne sur le cinquième signe du Zodiaque et préside au renouvellement de la végétation. Il danse sur les nuages et fait tomber la pluie sur les cultures. On invoque son énergie fécondante mais il peut lever des tempêtes et des vents destructeurs.

     

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    Di-lung règne sur les sources et les cours d'eau.

     

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    Fu-zang-lung est le gardien des trésors et des objets magiques. Il connaît l'emplacement des veines précieuses de la terre et des filons métallifères.

     

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    (Image Tao-yin.com)


    Huang-lung est le cheval dragon ou le dragon jaune. Il a jailli du fleuve Jaune mythique et s'est incliné devant l'empereur légendaire Fu Hsi avant de lui transmettre les secrets de l'écriture et du Yi King.

     

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    Le dragon blanc représente l'Occident et la mort. Le souverain des eaux de l'est, du nord, du sud et de l'ouest est un majestueux dragon rouge-sang. Les dragons dorés concentrent une infinité de pouvoirs.

     

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    Omniprésent dans les croyances asiatiques, le dragon est invoqué pour la réalisation des projets. Il est également considéré comme un protecteur des naissances. Les enfants nés sous son obédience sont réputés éloigner le malheur et les coups du sort.

     

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    En 2012, pour célébrer l'année du Dragon, la Maison de Thé Mariage Frères a élaboré un thé vert, fruité et acidulé, aux baies de goji du Tibet.

     

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    Un dragon de cristal signé Lalique.

     

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    Un « papertoy » dragon créé par Tina Kraus, illustratrice allemande. Pour tous ceux qui aiment les dragons et pour mon aminaute JILL et son dragonien fétiche!

     

    Jusqu'au 10 février 2013, le Dragon nous insufflera son charisme et sa vigueur flamboyante mais il continuera d'être invoqué pour attirer la chance, le bonheur et la prospérité, à chaque nouveau printemps, malgré les turbulences de son caractère... Il est le seigneur des cycles de la mort et de la vie.

     

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    Dans les contes et les légendes d'Occident, les récits religieux et l'imaginaire collectif, les dragons sont malheureusement perçus comme des tueurs impitoyables. Souvent dotés, comme les démons, de grandes ailes membraneuses, il font preuve d'une voracité sans limites et tombent sous les coups de lance ou d'épée des saints guerriers. Mais ils apparaissent aussi comme des initiateurs, liés aux anciens cultes agraires. Je leur consacrerai une étude dans quelques temps.

     

    L'année du dragon s'achève et un autre animal, tout aussi fertile, sage et fascinant, s'apprête à régner sur l'année nouvelle et les rythmes calendaires.

     

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    Que le Serpent d'Eau vous invite à explorer avec passion les mondes fabuleux et les traditions millénaires qu'il gouverne! Je vous donne rendez-vous dans quelques semaines pour découvrir un article qui lui sera entièrement consacré.

     

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    Bibliographie


    Marcel GRANET: La civilisation chinoise. Albin Michel, 1930.

     

    La pensée chinoise. Albin Michel, 1994.

     

    Martine LEYRIS: La Chine du dragon impérial, collection »Les grands Empires » chez Robert Laffont, 1982.

     

    Maurice Louis TOURNIER: L'imaginaire et la symbolique dans la Chine ancienne. Paris: L'Harmattan, 1991.

     

    La Chine ancienne: Pays du dragon céleste. Ouvrage collectif publié chez Larousse.

     

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    Merci de votre fidélité, vos doux mots d'amitié me touchent profondément!

    Plume4

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    Chers Ami(e)s,


    Nous pleurons une rose qui souriait à la vie...


    Line dont les mots, la sensibilité et le charme flamboyant ont profondément marqué ceux qui la connaissaient. Son blog, Le sourire de Line, n'existe plus...

     


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    Qu'une douce lumière imprègne son voyage vers des rives de sereine beauté!


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    Je présente à la famille de Line mes condoléances les plus attristées.


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    Une rose mon amie

    Dans l'éclat de sa jeunesse

    Une rose poétesse

    Vers d'autres cieux est partie


    Sa plume sur l'océan

    Sa lumière dans le vent

    Ciselée par les aurores

    Et les nuits qu'elle aimait tant


    Blancs rivages de l'hiver

    Premier souffle du printemps

    Le chant de son univers

    Est une île au creux du temps


    Île aux sortilèges bleus

    Tissée de parfums mythiques

    Et de frondaisons de feu

    Mêlées d'encres chimériques


    Rose en ses velours épars

    Sur la grève des adieux

    Les nacres de son regard

    Tremblent à l'horizon soyeux


    La Nature dans sa danse

    Lisse le sable brillant

    Dans la trame du silence

    J'entendrai ses mots d'argent...


    Cendrine


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    Te souviens-tu de cette rose

    Ensorceleuse du jardin?

    Tu aimais tant sa carnation

    Son coeur de fièvre et son parfum

    Que sa lumière jusqu'à toi

    Palpite en doux rubans de soie...


    Au revoir mon amie!


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    Plume4

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