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    Elle se dresse au numéro 129 de la rue Saint-Dominique, dans le 7e arrondissement de Paris. Située autrefois face à l'Hôpital Militaire du Gros Caillou, elle s'élève aujourd'hui au coeur d'une élégante petite place bordée d'arcades.

     

    Elle fut édifiée en 1806 à partir des plans de François-Jean Bralle (1750-1831), ingénieur en chef des Ponts et Chaussées et maître d'oeuvre des travaux hydrauliques de la Ville de Paris. Son gracieux décor fut réalisé par Pierre-Nicolas Beauvallet (1750-1818).

     

    Elle appartenait à un ensemble de quinze fontaines commandées par Napoléon Ier (1769-1821).

     

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    Ornée d'un bas-relief qui représente la déesse Hygie apportant ses soins au dieu Mars, elle se compose d'un édicule carré, souligné à chaque angle par un pilastre d'ordre dorique. Une frise de conques marines alternant avec des triglyphes court au sommet de l'édifice.

     

    La proximité du Champ de Mars et la position stratégique de l'Hôpital Militaire du Gros Caillou ont déterminé le choix de l'iconographie.

     

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    Un vase au décor mythologique est sculpté sur chaque face latérale.

     

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    Des créatures chimériques viennent compléter l'ensemble.

     

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    Une sorte de « dragon des eaux », doté d'une queue bifide et de pattes palmées, semble jaillir des flots.

     

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    Un capricorne marin se pare de belles cornes de bélier. La lumière souligne les enroulements de sa queue et la finesse de ses écailles.

     

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    Des mascarons fantastiques versent l'eau dans des bassins en forme de demi-lune. L'eau venait jadis de la pompe du Gros-Caillou.

     

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    D'après Amaury Duval: « Le nom de Gros-Caillou, que porte aujourd'hui le faubourg, lui vient (…) de l'enseigne qu'avait prise une maison de débauche placée auprès d'un rocher. C'est au lieu où existait cette pierre et cette maison, qu'a été construite, dans le dernier siècle, l'église dite du Gros-Caillou, comme succursale de Saint-Sulpice. » Les Fontaines de Paris, anciennes et nouvelles. P.98.

     

    Érigée en 1859 autour de la fontaine, la place bordée d'arcades s'inspire des loggias de la Renaissance italienne.

     

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    Les dieux de la fontaine

     

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    Déesse très honorée dans la Grèce antique, Hygie était la fille d'Asclépios, le dieu de la médecine. Protectrice de la santé, elle veillait à la propreté et à la bonne distribution des soins. De son nom dérive le mot « hygiène ».

     

    Invoquée pour prévenir les maladies et apaiser la douleur, elle était également associée à des cultes lunaires.

     

    Elle tient ici une coupe contenant le remède qu'elle offre au dieu Mars. Un serpent, emblème de purification et de vigilance, s'enroule autour de son bras.

     

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    Mars est figuré « à l'antique », dans la nudité du guerrier, mais il porte une moustache et d'impressionnants favoris, à l'instar des grognards de la première Grande Armée.

     

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    Il est appuyé contre un bouclier et accompagné d'un coq au torse fièrement bombé.

     

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    Depuis l'Antiquité, le coq est un emblème solaire qui annonce, par son cri si caractéristique, la venue du jour. Il était représenté sur les boucliers, les stèles et les camées et considéré comme une redoutable amulette contre les démons nocturnes.

     

    Il apparaît sur des monnaies de Grèce et d'Asie Mineure, auréolé de flammes ou couronné par des spirales qui évoquent la course du soleil.

     

    Gardien des forces de lumière, il était associé à de nombreuses divinités:

     

    Lug/Mercureet Apollon/Belenosdit « le brillant » qui préside au lever du jour. Mars, le dieu de la guerre et du combat contre les puissances maléfiques. Asclépios, le dieu de la médecine, victorieux de la maladie et destructeur des miasmes.

     

    D'après la croyance populaire, le coq pouvait éloigner les épidémies grâce à son sang, apaiser la fièvre et déceler l'emplacement des meilleures plantes médicinales. Il favorisait la cicatrisation des blessures. Son regard hypnotisait les malades et guérissait les problèmes oculaires.

     

    Des troupeaux de coqs sacrés vivaient dans les sanctuaires d'Asclépios où ils symbolisaient les pouvoirs mêlés de la lumière et de l'hypnose, les vertus des racines et des herbes et l'exploration des rêves.

     

    Sentinelle au sommet des tours et des clochers, le coq défend les villes contre les puissances infernales et les vents de tempête. Doté d'une nature farouche et belliqueuse, il est celui qui ressuscite l'aurore après la nuit.

     

    Il se dévoile ici comme le compagnon de Mars et l'animal sacré d'Asclépios, le père d'Hygie.

     

     

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    La construction de la fontaine est emblématique des changements majeurs survenus dans Paris après l'arrivée de Napoléon au pouvoir.

     

    Quand Napoléon devint Premier Consul (en 1799) après le Directoire, il trouva une France épuisée, affamée et insalubre. Les rues de Paris se noyaient dans une atmosphère médiévale et les vieilles fontaines ne pouvaient plus fournir de l'eau aux Parisiens qui devaient s'approvisionner dans la Seine.

     

    Napoléon s'employa donc à moderniser et à assainir la capitale dont il fit démolir de nombreuses ruelles. Il fit construire un réseau d'égouts, des trottoirs et des caniveaux, éclairer les rues, édifier des ponts et des fontaines. Il fit aussi numéroter les maisons.

     

    A partir de 1806, les chantiers fleurirent dans Paris qui se métamorphosa rapidement. Dans ce contexte, Mars et Hygie apparurent comme les divinités tutélaires de cette politique de conquête et d'embellissement.

     

    Pour le promeneur contemporain, la rue Saint-Dominique constitue une fort agréable balade, le long des hôtels particuliers et des vitrines alléchantes, à la découverte d'un monument qui a contribué à offrir de l'eau et des perspectives nouvelles aux habitants de Paris.

     

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    Bibliographie

     

    André CASTELOT: Napoléon. Paris: Tallandier, 1969.

     

    Amaury DUVAL: Les Fontaines de Paris, anciennes et nouvelles. Nouvelle édition, Paris: Bance aîné, 1828.

     

    Adolphe JOANNE: Paris illustré. Paris: Hachette, 1863.

     

    Théophile LAVALLÉE: Histoire de Paris depuis le temps des Gaulois jusqu'en 1850.Paris: Hetzel, 1852.

     

     

     

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