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    Sur la rive droite de la Seine, les Guichets du Louvre dessinent un passage à travers un bâtiment majestueux, vitrine des arts qui se niche entre deux pavillons néo-renaissance. Au débouché du Pont du Carrousel, ces trois grandes ouvertures voûtées nous invitent à découvrir les visages d'un palais devenu musée.

     

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    Émanation de la toute puissance des Arts sous le règne de Napoléon III (1852-1870), cette entrée monumentale se pare d'un riche programme iconographique et rythme avec élégance la scénographie du Bord de l'Eau.

     

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    Le Triomphe d'Amphitrite, 1868, par Jean-Baptiste Cabet (1815-1876). Une belle que l'on contemple en cheminant le long du fleuve.

     

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    La Grande Galerie longeant la Seine fut construite, entre 1595 et 1610, sous le règne d'Henri IV, par Louis Métezeau (du côté est) et Jacques II Androuet du Cerceau (du côté ouest). Coupant l'enceinte de Charles V, elle permettait au roi d'accéder aux Tuileries depuis ses appartements du Louvre et se terminait par le Pavillon de Flore.

     

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    La perspective de la Grande Galerie, le Louvre d'Henri IV et les Tuileries sont mis à l'honneur sur cette carte murale, signée Louis Poisson (peintre du XVIIe siècle) et conservée dans la Galerie des Cerfs, au Château de Fontainebleau.

     

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    Après différentes évolutions, la partie occidentale de la galerie fut démolie puis reconstruite et élargie par l'architecte Hector-Martin Lefuel (1810-1880), dans un style imitant celui de Louis Métezeau (1560-1615). Les travées furent ornées de sculptures, de pilastres cannelés, de colonnes ciselées, de frises ornementales et de frontons.

     

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    Entre 1861 et 1870, Hector Lefuel aménagea la nouvelle façade du Louvre, côté Seine. De 1865 à 1868, il l'agrémenta de Guichets monumentaux ouverts sur la Place du Carrousel, entre le Pavillon Lesdiguières et le Pavillon de la Trémoille.

     

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    Le Pavillon Lesdiguières avant le début des travaux. (Photo Médiathèque de l'architecture et du patrimoine.).

     

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    Les vestiges du même pavillon à l'époque de la reconstruction .

     

    Cette photo d'Édouard Baldus (1813-1889), datant de décembre 1865, décrit le futur emplacement des Guichets. Nous apercevons une partie de l'ancien Pont du Carrousel et, en direction des tours de Notre-Dame, le Pont des Arts et le Pont-Neuf. (Le musée d'Orsay acquit en 1988 cette épreuve sur papier albuminé, conservée sous la cote cliché 02-001217, numéro d'inventaire PHO1988-113.)

     

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    On admirait autrefois, au-dessus de l'arche centrale, une figure équestre en bronze de l'Empereur Napoléon III, réalisée par Antoine Barye (1796-1895).

     

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    Il n'existe que peu d'archives à propos de ce bas-relief et la photo a été très difficile à trouver, comme une grande partie de la documentation de cet article...

     

    En décembre 1866, Barye reçut la commande du Napoléon III à cheval, destiné à compléter la décoration centrale des Guichets, côté Seine. Son installation en 1868 engendra de virulentes critiques, la figuration du souverain en empereur romain étant jugée trop massive et inappropriée.

     

    Le 5 septembre 1870, l'oeuvre fut arrachée sur l'ordre du Maire de Paris, désireux de faire disparaître les emblèmes impériaux et les morceaux furent relégués dans un dépôt. Recueillis en 1922 par le Département des sculptures du Louvre, ils ne furent restaurés qu'après leur transfert à Compiègne, en 1973. Hélas les jambes du cheval, fracassées en 1870, n'ont jamais été retrouvées.

     

    Hector Lefuel, insatisfait du travail de Barye, commanda au sculpteur Alfred Jacquemart (1824-1896) une maquette, en vue de remplacer la première statue de l'empereur.

     

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      Le musée du Louvre conserve l'esquisse en cire du projet, sur architecture de bois, signée A.J. et présentant Napoléon III à cheval en costume romain mais l'oeuvre définitive ne vit jamais le jour.

     

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    La statue impériale fut remplacée, en 1877, par le Génie des Arts d'Antonin Mercié mais les allégories aquatiques qui encadraient la figure équestre de Napoléon III ont été conservées.

     

    Sculptées par Antoine Barye, elles représentent la Rivière, du côté gauche, et le Fleuve, du côté droit.

     

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    La Rivière

     

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    Le Fleuve

     

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    La couronne napoléonienne et l'aigle impérial aux ailes déployées sont toujours en place au sommet du fronton, sculpté par Théodore-Charles Gruyère (1813-1885).

     

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    Le Génie des Arts rayonne tel Apollon, le dieu du soleil. Il chevauche Pégase, le cheval ailé, qui se cabre vers le ciel dans un mouvement de conquête. A côté d'eux, voltige la Renommée, muse drapée tenant à la main un rameau de laurier.

     

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    Des lignes souples animent la composition, rythmée par le jaillissement des draperies, le galbe élégant des figures et la puissance du relief qui aimante la lumière.

     

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    Le Génie des Arts, photographié après 1870 par Charles Marville(1813-1879). (Photo musée d'Orsay.)

     

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    Le Génie des Arts à l'affiche!

     

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    Les imposantes toitures des pavillons sont couronnées par des clochetons ouvragés qui affichent un curieux monogramme.

     

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    Des N renversés! Une subtile manière de renverser l'empereur Napoléon III, au règne de plus en plus controversé à l'époque de la construction des Guichets? Ou (les spéculations vont bon train et sont sujettes à caution...) un cryptage amoureux: l'inverse de la « haine » signifiant l'amour?

     

     

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    De part et d'autre de l'arche centrale, le sculpteur François Jouffroy (1806-1882) a réalisé deux groupes allégoriques: la Marine Guerrière et la Marine Marchande.

     

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    De luxuriantes sculptures orientées vers le Pont du Carrousel et le Quai Voltaire, sur la rive gauche et adossées à des bossages architecturaux décorés de multiples « vermiculures » ou « glyphes vermiculés », rappelant les décors de la Renaissance.

     

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    La Marine Guerrière, 1866.

     

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    La Marine Marchande, 1866.

     

    La marine connut, sous le règne de Napoléon III, des progrès conséquents. Utilisant la vapeur comme moyen de propulsion, la flotte de l'empereur sillonna les mers du globe et s'implanta dans plusieurs territoires d'intérêt stratégique (Congo, Guinée, Amazonie, Guyane...). Cette expansion favorisa l'essor du commerce maritime et fluvial et le développement de nombreuses missions scientifiques.

     

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    Conçues comme des piliers de la puissance nationale, ces allégories aquatiques se parent de chérubins gracieux, de fruits, de rostres de navires et de têtes de bélier, emblèmes solaires de force et de courage.

     

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    Pour rejoindre la Place du Carrousel, nous traversons ces arcades voûtées où la sobriété est de mise mais l'ensemble abrite une forêt de réverbères et de belles portes ornées d'emblèmes impériaux, à l'instar de celle-ci:

     

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    J'apprécie le décor raffiné de ce soupirail qui titille mon imagination...

     

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    La Place du Carrousel offre un agréable panorama sur les ailes du Louvre et l'Arc de Triomphe du Carrousel, construit, de 1807 à 1809, par les célèbres architectes Percier et Fontaine.

     

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    Cet arbre-lampadaire déroule avec grâce les courbes de ses branches...

     

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    Les trois arches carrossables des Guichets s'insèrent entre deux pavillons dont le décor s'inspire des ornements de la Renaissance.

     

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    Chiffres, emblèmes, rinceaux, masques, fruits, cartouches, oculus et réseaux vermiculés...

     

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    Le Pavillon Lesdiguières fut érigé en l'honneur de François de Bonne (1543-1626), baron de Champsaur, dernier Connétable de France et premier duc de Lesdiguières, entre 1622 et 1626.

     

     

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    Médaille en fonte à l'effigie du duc de Lesdiguières, 1600, par le graveur Guillaume Dupré. (Merci au site de numismatique Inumis.)

     

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    Les gracieuses Renommées sont l'oeuvre d'Auguste Poitevin (1819-1873).

     

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    (Photo d'Édouard Baldus, musée d'Orsay.)

     

    En 1855, le Pavillon Lesdiguières accueillit une statuaire monumentale qui resta en place pendant seulement dix ans.

     

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    La Gloire et l'Immortalité d'Auguste Dumont (1801-1884), projet de fronton en plâtre conservé au Musée du Louvre.

     

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    Le fronton photographié par Édouard Baldus, 1855-1857. (Photo musée d'Orsay).

     

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    Le Génie de la Guerre, d'Auguste Dumont.(Photo Édouard Baldus, musée d'Orsay.)

     

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    (Le Pavillon Lesdiguières, Édouard Baldus, 1857, photo musée d'Orsay.)

     

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    Le Pavillon de la Trémoille rend hommage à Henri de la Trémoille (1598-1674), Maître de camp de la cavalerie légère de France, sous le règne de Louis XIII.

     

     

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    Les statues couronnant les toitures de ces pavillons sont caractéristiques du style Beaux-Arts, un savant mélange d'éclectisme architectural et de classicisme triomphant, en vigueur de 1860 jusqu'à la Première Guerre Mondiale et contemporain du style victorien en Angleterre.

     

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    Il se caractérise par une profusion de détails architectoniques: statues, colonnes, balustrades, arches, guirlandes et pilastres décorés, escaliers monumentaux et se réfère à un éventail de styles issus de l'Antiquité, du Baroque et du Classicisme.

     

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    Il naquit lors des grands travaux d'extension réalisés au Louvre par Louis Visconti et Hector Lefuel et célèbre les institutions majeures que sont l'École des Beaux-Arts et l'Académie des Beaux-Arts.

     

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    La prestigieuse École des Beaux-Arts se dresse Quai Malaquais, sur la rive gauche de la Seine, de l'autre côté du Pont du Carrousel. Ainsi s'établit un lien subtil entre les temples du dessin, de la peinture, de la sculpture et de l'architecture.

     

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    La traversée des Guichets du Louvre nous fait redécouvrir la sculpture française de la seconde moitié du XIXe siècle et les artistes les plus en vogue de l'époque.

     

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    Augustin Dumont (1801-1884) réalisa, au sommet du Pavillon Lesdiguières, les allégories de l'Architecture et de la Sculpture, sciences maîtresses sur lesquelles s'appuyait la propagande héroïque de Napoléon III.

     

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    L'Architecture, 1868.

     

    Ces oeuvres traduisent la volonté de l'empereur d' « incarner » le XIXe siècle et d'inscrire son empreinte magistrale dans le domaine des arts.

     

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    La Sculpture, 1868.

     

    Nous devons à cet artiste prestigieux le Génie de la Bastille (1835) et le Napoléon Ier en César (1863) de la Colonne Vendôme.

     

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    De part et d'autre de la majestueuse toiture, deux guerriers assis, sculptés par Jean Joseph Perraud (1819-1876), incarnent les vertus héroïques antiques.

     

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    Deux lions majestueux, signés Emmanuel Fremiet (1824-1910).

     

    Ce sculpteur néoclassique, apprécié pour ses sculptures animalières aux expressions naturalistes, connut la célébrité grâce à la statue équestre de Jeanne d'Arc en bronze doré, située Place des Pyramides et à l'impétueux Saint-Michel terrassant le dragon, installé au sommet de la flèche du Mont Saint-Michel (1897) et couronnant, en plus petit, le campanile de l'église Saint-Michel des Batignolles.

     

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    Gardiens des temples et des palais, symboles de protection et de pouvoir, les lions sont les figures tutélaires d'une France qui rayonne sur l'Europe et les arts.

     

    Des sculptures de chérubins et de génies exaltent la mémoire des anciens Empires et la puissance navale et militaire de la France.

     

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    La Guerre de Democrito Gandolfi(1797-1874).

     

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    (Photo d'Édouard Baldus, musée d'Orsay.)

     

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    La Navigation de Pierre Travaux(1822-1869).

     

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    (Photo Édouard Baldus, musée d'Orsay).

     

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    L'Asie de Jean-Jacques Elshoecht(1797-1856).

     

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    (Photo Édouard Baldus, musée d'Orsay).

     

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    Les Combats de Edme Jean Louis Sornet(1802-1876). L'oeuvre a malheureusement subi les outrages du temps...

     

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    (Photo Édouard Baldus, musée d'Orsay).

     

    Sur les couronnements du Pavillon de Trémoille, trois groupes de Génies répondent à la même esthétique.

     

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    La Vengeance de Louis-Léopold Chambard(1811-1895).

     

    Le glaive et les rameaux de laurier symbolisent les succès militaires de l'Antiquité. La tête de Méduse (Gorgonéion) fut tranchée par le héros Persée qui l'offrit à Athéna, la déesse des arts et de la guerre.

     

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    La Navigation de Louis Meunier,1868.

     

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    La Chasse par Aimé-Napoléon Perrey (1813-1883).

     

    Ce sculpteur, très prolifique en son temps, réalisa de nombreuses sculptures pour les églises et les monuments de Paris. Il fut aussi l'auteur, en 1881, de trois Chevaliers sur les huit qui couronnent la toiture de l'Hôtel de Ville de Paris. Ces chevaliers décorent la bannière de mon blog!

     

    La chasse fut une activité très prisée sous le règne de Napoléon III qui rétablit, en 1852, la vénerie impériale et initia la construction de plusieurs pavillons de chasse.

     

    De nombreuses voix décrièrent à l'époque ce florilège de statues, le qualifiant de « pompeux pastiche de l'antique » et jugeant « indigestes » les ornements représentés. Hector Lefuel dut alors défendre, sur la scène publique, son « projet de restauration ». Il fallut attendre les travaux de construction de la Pyramide dans la cour Napoléon pour que ces oeuvres typiques du style Beaux-Arts soient redécouvertes et appréhendées sous un jour nouveau.

     

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    J'aime tout particulièrement ce tableau de Georges Stein (1870-1955), intitulé Paris, Pont du Carrousel. L'artiste, qui excellait à croquer sur le vif les parisiens de la Belle-Époque, nous livre une scène au naturel des plus gracieux, dans une subtile alchimie de tons roses et gris. Vous reconnaîtrez, dans le fond, le Pavillon Lesdiguières et son beau clocheton, les Guichets et le Génie des Arts...

     

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    Le Louvre est un aimant à désirs... On s'y précipite par une myriade de portes. On y entre avec une fièvre d'explorateur, espérant y dénicher la « merveille » qui embrasera notre imagination. Ce palais quasi millénaire, temple des rois et mémorial des différentes époques de l'Histoire, est aussi envoûtant à l'extérieur qu'à l'intérieur. Il nous offre, à toutes saisons, une parure de symboles, d'ornements et de statues et nous invite à caresser, avec une authentique ferveur, les courbes de son architecture.

     

    Bibliographie

     

    Dictionnaire général des artistes de l'École Française depuis l'origine des arts du dessin jusqu'à nos jours: architectes, peintres, sculpteurs, graveurs et lithographes.Paris: Renouard, 1882-1885.

     

    Gustave PESSARD: Nouveau dictionnaire historique de Paris.Paris: Lejay, 1904.

     

    Félix DE ROCHEGUDE: Promenades dans toutes les rues de Paris. Paris: Hachette, 1910.

     

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    Les Guichets du Louvre dans le Paris illustré, 1869.

     

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    Le Pont du Carrousel et les Guichets du Louvre (merci au site timbresponts.fr).

     

     

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    De part et d'autre de la Grande Allée, deux bassins s'étendent sous les arbres, dans une atmosphère apaisante et romantique. Couronnés par un banc semi-circulaire appelé exèdre, ils sont parés de sculptures et bordés par une végétation luxuriante.

     

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    Ils furent réalisés après la Révolution, quand le jardin devint « bien national ». La Convention décida la restauration des parties dégradées et la mise en oeuvre d'un programme d'embellissements.

     

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    Dans ce contexte, le projet de restructuration du domaine des Tuileries fut confié, en 1794, au peintre Jacques Louis David (1748-1825), également député et grand ordonnateur des fêtes de la Révolution.

     

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    Autoportrait de l'artiste, 1794.

     

    Assisté par son beau-frère, l'architecte Auguste Cheval de Saint-Hubert, Louis David devait élaborer un ensemble monumental composé de galeries, de propylées, d'une palestre et des deux exèdres mais le projet fut désavoué après la chute de Robespierre.

     

    Demeurent les fameuses exèdres, insérées dans la végétation et décorées de statues qui proviennent du Château de Marly, dans les Yvelines. Aujourd'hui, ce sont des moulages que nous contemplons, les originaux étant conservés au Musée du Louvre.

     

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    Une exèdre est un édicule de pierre semi-circulaire ou rectangulaire qui dessine un banc, parfois décoré de niches et de statues. Dans la Grèce antique, cette structure architecturale était un élément privilégié des lieux publics, des sanctuaires, des agorae et des voies sacrées.

     

    L'exèdre est associée à la conversation et à la philosophie. Espace de réunion où se réunissaient autrefois les poètes et les philosophes, elle offrait des banquettes de pierre décorées de dauphins, de rinceaux et de grandes feuilles d'acanthe. Parfois, on y représentait les donateurs qui les avaient fait ériger.

     

    Dans la Rome antique, elle s'inséra, agrémentée de niches et de statues, dans les façades des monuments publics.

     

    Les exèdres des Tuileries sont l'émanation d'une volonté patriotique se référant aux grandeurs helléniques.

     

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    La séduisante Vénus Callipyge  de François Barois (1656-1726) règne sur l'exèdre Sud.

     

     

     

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    On peut admirer au Louvre le marbre originel des années 1683-1686.

     

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    Vénus Callipyge soulève son péplos et contemple ses courbes avenantes par dessus son épaule.

     

    Les mots kallos: « beauté » et  pygos: « fesse » sont à l'origine du terme « Callipyge » et le mot « kalligloutos » se traduit par « aux jolies fesses ».

     

    D'après l'érudit grec Athénée (IIe-IIIe siècle après J.-C.), il existait un temple dédié à Aphrodite des belles fesses, à Syracuse, en Sicile.

     

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    Vénus Callipyge au musée archéologique national de Naples.

     

    Les deux filles d'un fermier demandèrent à un jeune homme qui passait de désigner celle qui avait le plus joli postérieur. Après une observation assidue, il choisit l'aînée et s'éprit de sa beauté. Il retrouva ensuite son jeune frère à la ville et l'encouragea à aller contempler les charmes de la campagne. Le cadet suivit son conseil et fut séduit par la plus jeune soeur. Malgré les réticences de leur père, riche et âgé, les garçons épousèrent leurs sensuelles dulcinées. Elles fondèrent alors, en guise de remerciement, un temple dédié à la déesse aux jolies fesses.

     

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    Les rotondités de la Vénus des Tuileries ont été voilées par le sculpteur Jean Thierry (1669-1739) afin de ne pas outrager la pudeur des dames!

     

    D'après le théoricien chrétien Clément d’Alexandrie (vers 150 après J.-C.-vers 220), un culte érotique était dédié à la déesse aux courbes avenantes. Elle traversa les époques et inspira, au XVIIe siècle, un conte en vers au fabuliste Jean de La Fontaine (1621-1695).

     

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    Les Contes sont aux adultes ce que les Fables sont aux enfants.

     

    Les Contes et Nouvelles en vers furent écrits entre 1660 et 1693. Bien que frappés par la censure officielle, ils connurent un succès immense et s'imposèrent comme une oeuvre majeure de la culture galante. Les amateurs de littérature libertine apprécieront ces truculentes saynètes et les charmantes illustrations de Jean-Honoré Fragonard (1732-1806).

     

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    Conte tiré d'Athénée

     

    « Du temps des Grecs, deux sœurs disaient avoir

    Aussi beau cul que fille de leur sorte;

    La question ne fut que de savoir

    Quelle des deux dessus l’autre l’emporte:

    Pour en juger un expert étant pris,

    À la moins jeune il accorde le prix,

    Puis l’épousant, lui fait don de son âme;

    À son exemple, un sien frère est épris

    De la cadette, et la prend pour sa femme;

    Tant fut entre eux, à la fin, procédé,

    Que par les sœurs un temple fut fondé,

    Dessous le nom de Vénus belle-fesse;

    Je ne sais pas à quelle intention;

    Mais c’eût été le temple de la Grèce

    Pour qui j’eusse eu plus de dévotion. »

     

    Quelques siècles plus tard, la Vénus Callipyge refleurit sous la plume de notre Georges Brassens national.

     

     

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    « Que jamais l'art abstrait, qui sévit maintenant

    N'enlève à vos attraits ce volume étonnant

    Au temps où les faux culs sont la majorité

    Gloire à celui qui dit toute la vérité

     

    Votre dos perd son nom avec si bonne grâce

    Qu'on ne peut s'empêcher de lui donner raison

    Que ne suis-je, madame, un poète de race

    Pour dire à sa louange un immortel blason

     

    En le voyant passer, j'en eus la chair de poule

    Enfin, je vins au monde et, depuis, je lui voue

    Un culte véritable et, quand je perds aux boules

    En embrassant Fanny, je ne pense qu'à vous

     

    Pour obtenir, madame, un galbe de cet ordre

    Vous devez torturer les gens de votre entour

    Donner aux couturiers bien du fil à retordre

    Et vous devez crever votre dame d'atours

     

    C'est le duc de Bordeaux qui s'en va, tête basse

    Car il ressemble au mien comme deux gouttes d'eau

    S'il ressemblait au vôtre, on dirait, quand il passe

    " C'est un joli garçon que le duc de Bordeaux ! "

     

    Ne faites aucun cas des jaloux qui professent

    Que vous avez placé votre orgueil un peu bas

    Que vous présumez trop, en somme de vos fesses

    Et surtout, par faveur, ne vous asseyez pas

     

    Laissez-les raconter qu'en sortant de calèche

    La brise a fait voler votre robe et qu'on vit

    Écrite dans un cœur transpercé d'une flèche

    Cette expression triviale : " A Julot pour la vie "

     

    Laissez-les dire encor qu'à la cour d'Angleterre

    Faisant la révérence aux souverains anglois

    Vous êtes, patatras ! tombée assise à terre

    La loi d'la pesanteur est dur', mais c'est la loi.

     

    Nul ne peut aujourd'hui trépasser sans voir Naples

    A l'assaut des chefs-d'œuvre ils veulent tous courir

    Mes ambitions à moi sont bien plus raisonnables:

    Voir votre académie, madame, et puis mourir.

     

    Que jamais l'art abstrait, qui sévit maintenant

    N'enlève à vos attraits ce volume étonnant

    Au temps où les faux culs sont la majorité

    Gloire à celui qui dit toute la vérité. »

     

     

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    Vénus Callipyge

     

    Ces illustrations sont d'Alain Bonnefoit, maître en lithographie. Pour les contempler, vous pouvez visiter le beau site de la Galerie-jpm.com.

     

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    A l'extrémité opposée du bassin, ces deux statues semblent prendre leur élan. Il s'agit de Daphné poursuivie par Apollon et d'Apollon poursuivant Daphné.

     

    Ce groupe illustre un passage des Métamorphoses d'Ovide. Le dieu du soleil, sculpté par Nicolas Coustou (1658-1733), et la nymphe des bois, réalisée par Guillaume Coustou (1677-1746), ornèrent, vers 1713–1714, un des bassins des Carpes du Parc de Marly. En 1798, on les plaça dans l'exèdre Sud des Tuileries où ils demeurèrent jusqu'en 1940.

     

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    Daphné est une nymphe, fille du dieu fleuve Pénée et de la déesse Terre.

     

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    Après avoir vaincu le monstrueux serpent Python, Apollon rencontra Cupidon sur le bord du chemin. Il se vanta de sa réussite en raillant les sortilèges du chérubin. Piqué au vif, Cupidon décocha deux flèches, l'une, en or, sur Apollon qui s'éprit de la ravissante Daphné, et l'autre, en plomb, dans le coeur de la nymphe. Elle en éprouva de la répulsion pour les plaisirs charnels mais Apollon la poursuivit de ses assiduités. Épuisée, Daphné sollicita l'aide de son père et le dieu fleuve la métamorphosa en un bosquet de laurier rose (rhododaphné). Apollon la désigna alors comme son arbre sacré.

     

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    « (...) Une lourde torpeur envahit ses membres, une mince écorce ceint sa délicate poitrine, ses cheveux poussent en feuillage, ses bras s'allongent en rameaux ; ses pieds, il y a un instant, si rapides sont fixés au sol par de solides racines, la cime d'un arbre occupe sa tête ; de sa beauté, ne demeure que l'éclat.

     

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    Phébus, cependant, brûle de la même passion, la main droite posée sur le tronc, il sent encore, sous la nouvelle écorce, battre le cœur ; entourant de ses bras les rameaux - qui étaient les membres de Daphné - il étouffe le bois de baisers ; mais les baisers du dieu, le bois les refuse. Alors le dieu lui dit : " Puisque tu ne peux être ma femme, tu seras, du moins, mon arbre " ; laurier, tu pareras toujours ma chevelure, ma cithare, mon carquois ; (...) Péan avait fini de parler; alors le laurier inclina ses jeunes rameaux et on le vit agiter sa cime comme une tête. » (Péan est une épiclèse, c'est à dire une épithète associée à Apollon. )

     

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    Apollon au Louvre.

     

    Au fil des siècles, le mythe d'Apollon et Daphné a profondément inspiré les artistes.

     

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    Un manuscrit du XVe siècle...

     

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    Apollon et Daphné, 1470-1480, par Antonio del Pollaiuolo (1429/33-1498). Ce tableau est conservé à la National Gallery de Londres.

     

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    Daphné en argent ciselé, surmontée par une ramure de corail. Cet ornement de table fut réalisé, vers 1550, par Wenzel Jamnitzer (1507/08-1585), un célèbre orfèvre de Nuremberg.

     

    Il décrit le moment où s'opère la métamorphose de Daphné. L'oeuvre élégante et influencée par la statuaire antique révèle aussi le goût des artistes de la Renaissance pour l’exotisme et les univers marins.

     

    Daphné repose sur un socle décoré de têtes d’anges et de mufles de lion d'où émergent des fragments de roches métamorphiques. Un certain mystère entoure cette pièce d'argenterie. Était-elle un luxueux centre de table associé aux armoiries d'un prince germanique, un ustensile médiéval appelé « languier » où l’on suspendait des « langues de serpent », dents de requin fossilisées utilisées pour détecter le poison, ou une « merveille », (mirabilia) recherchée par des collectionneurs?

     

    Pêché en grande profondeur en Méditerranée, le corail rouge était réputé pour ses vertus prophylactiques. On le considérait comme une espèce étrange qui oscillait entre végétal et minéral. Très apprécié pour sa beauté, il était fréquemment utilisé dans les arts à la Renaissance.

     

     

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    On retrouve Apollon et Daphné sur cette vignette de François Chauveau (1613-1676), extraite de la traduction des Métamorphoses d'Ovide (43 avant J.-C.-17) par Isaac de Benserade (1613-1691). L'ouvrage intitulé « Métamorphoses d'Ovide en rondeaux, imprimés et enrichis de figures » parut en 1676 à Paris, sous les presses de l'Imprimerie Royale.

     

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    A Versailles, Apollon et Daphné, d'Antoine Coypel (1661-1722) se laissent admirer parmi les joyaux du Salon de Mercure.

     

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    Apollon et Daphné, 1622-1625, par Gian Lorenzo Bernini, dit Le Bernin(1598-1680).

     

    Cette oeuvre baroque fut commandée par le Cardinal Borghèse en 1622. Le mouvement suscité par les lignes foisonnantes et les corps en déséquilibre aspire le regard.

     

    Apollon rattrape Daphné au moment où débute la métamorphose. La nymphe lève les bras. L'écorce l'enveloppe jusqu'aux hanches et son corps dessine une arabesque souple et passionnée. Son sang devient sève et sa peau, ses doigts, sa chevelure se changent en feuilles ondoyantes. Simultanément, une expression d'effroi se lit sur son visage. Apollon saisit sa taille d'une main mais il ne peut la faire revenir à son humanité.

     

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    Cet éventail du XVIIIe siècle, conservé au Musée des Arts Décoratifs de Bordeaux, nous offre, par ses couleurs précieuses et son dessin raffiné, sa vision plus apaisée du mythe d'Apollon et Daphné.

     

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    Le Département des Arts Graphiques au Louvre conserve cette jolie miniature signée Jean-Honoré Fragonard (1732-1806).

     

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    Au musée Calvet à Avignon, on peut admirer ce tableau de l'école romaine du XVIIIe siècle, attribué à Pietro Bianchi (1694-1740) et très apprécié des historiens d'art pour la qualité de ses couleurs.

     

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    Ce bas-relief provient de l'ancienne Folie de la Bouëxière, autrefois située dans le 18e arrondissement de Paris. Réalisé par Sébastien-Nicolas Adam (1705-1778), il est aujourd'hui conservé au Musée Carnavalet.

     

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    Apollon et Daphné, vers 1844, par Théodore Chassériau(1819-1856).

     

    La transformation de Daphné est sublimée par les couleurs voluptueuses, la pureté des lignes, la grâce et le romantisme qui émanent de la composition. Le corps lunaire, chrysalide sensuelle sur fond de sylve, et l'attitude suppliante d'Apollon nous offrent un spectacle d'une troublante beauté.

     

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    Apollon poursuivant Daphné, 1908, par John William Waterhouse (1849-1917).

     

    Le peintre nous livre une vision intime du mythe, centrée sur les jeux de regards et l'élégance des attitudes. La métamorphose s'opère dans un monde luxuriant où la femme devient prêtresse, échappant aux lois de la réalité et aux désirs de l'homme pour épouser les forces de la Nature. Le tableau de Waterhouse révèle aussi une complexe attirance entre les personnages...

     

    Quittons Vénus Callipyge, Apollon et Daphné pour rejoindre l'exèdre Nord.

     

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    Elle est conçue de la même manière que l'exèdre Sud mais le programme iconographique est différent.

     

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    Le faune au chevreau, oeuvre de Pierre Le Pautre (1659-1744), réinterprète une statue antique, exhumée en 1675.

     

     

     

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    Le marbre originel, datant de 1685, fut placé à Marly, dans une « salle verte », aux alentours de 1695 puis déplacé, en 1707, au bosquet du Couchant. Il fut transporté aux Tuileries en 1797.

     

     

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    On aperçoit une flûte de Pan, aérophone attribué au dieu Pan, maître de la fertilité des bois et des troupeaux. Dans les réceptacles où circule le son, circulent aussi la magie et les forces de fécondité.

     

    Pan tomba éperdument amoureux de la nymphe Syrinx mais celle-ci, effrayée par la puissance érotique du dieu, se jeta dans le fleuve Ladon pour lui échapper. Là où elle disparut, jaillirent des roseaux qui bruissèrent, comme une voix, dans le vent. Pan les coupa et en assembla quelques-uns pour fabriquer une flûte qu'il baptisa Syrinx. Ainsi, par la magie du souffle, l'union de Pan et de Syrinx put s'accomplir.

     

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    Pan et Syrinx, 1657, par Michel Dorigny (1617-1665).

     

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    A l'extrémité du bassin, se dressent deux statues formant un groupe appelé « les coureurs ». Il s'agit d'Hippomène et d'Atalante.

     

    Hippomène fut commandé à Guillaume Coustou pour faire pendant à Atalante, copie d'antique par Pierre Le Pautre. Le groupe illustre un passage des Métamorphoses d'Ovide relatant l'histoire d'une farouche chasseresse qui défiait ses prétendants à la course.

     

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    Fille d'un roi qui désirait un fils, Atalante fut abandonnée dans la forêt mais une ourse l'allaita. Elle fut recueillie ensuite par des chasseurs et se révéla dotée de qualités physiques hors du commun. A la fois athlète accomplie, lutteuse redoutable et pouvant courir à une vitesse exceptionnelle, elle participa à l'expédition des Argonautes, conduite par le héros Jason.

     

    Voulant rester vierge, elle résolut de défier à la course les hommes qui souhaitaient l'épouser. Elle gagnait à chaque fois et ses prétendants étaient exécutés mais le jeune Hippomène choisit de relever le défi.

     

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    Il sollicita la déesse de l'amour qui lui offrit trois pommes d'or du Jardin des Hespérides, merveilleux jardin où, parmi des sources d'ambroisie, se dressait un arbre enchanté... Pendant la course qui l'opposait à Atalante, Hippomène fit rouler les précieux fruits sur le sol et la chasseresse s'arrêta pour les ramasser. Elle perdit pour la première fois.

     

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    La course d'Hippomène et d'Atalante, 1765, par Noël Hallé (1711-1781).

     

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    Atalante et Hippomène, 1618-1619, par Guido Reni (1575-1642).

     

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    La très sensuelle Toilette d'Atalante, 1850, par James Pradier (1790-1852) dans l'aile Richelieu au Louvre.

     

    Observons un moment les sculptures qui décorent les côtés des deux exèdres. Au bord des bassins qui semblent endormis, se dévoilent des sphinges, les femelles des sphinx, créatures fabuleuses au corps mi-léonin mi-humain.

     

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    Ces êtres mystérieux sont les gardiens des métamorphoses et des secrets mais chut, je prépare un article sur les sphinx et les sphinges de Paris...

     

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    L'exèdre Nord par Pierre-Antoine Mongin (1761-1827).

     

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    Ces bassins historiés sont des réceptacles de vie. Une végétation luxuriante s'y épanouit, attirant les insectes et les oiseaux qui viennent s'y reproduire en toute tranquillité.

     

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    Les iris en robes satinées se gorgent de soleil.

     

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    Les jardiniers ont installé une petite planche pour que demoiselles et damoiseaux à plumes puissent goûter les joies de l'eau.

     

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    Par leur conception, les exèdres des Tuileries sont des lieux à part dans l'évolution complexe du jardin. Elles exaltent l'amour, le désir et la beauté et célèbrent, de manière intemporelle, les vertus des philosophies antiques. Elles nous attirent au bord de l'eau, à fleur de rêve, où la lumière tisse ses enchantements...

     

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    Bibliographie

     

    Louis-Eustache AUDOT: Traité de la composition et de l'ornement des jardins, avec cent soixante et une planches représentant, en plus de six cents figures, des plans de jardins, des fabriques propres à leur décoration et des machines pour élever les eaux. Paris: Audot, éditeur du Bon Jardinier, 1839.

     

    Yves GIRAUD: La Fable de Daphné: essai sur un type de métamorphose végétale dans la littérature et les arts jusqu'à la fin du XVIIe siècle. Droz, 1968.

     

    Aubin Louis MILLIN: Description des statues des Tuileries. Paris: Fuchs, 1798.

     

    Claude-Henri WATELET: Dictionnaire de peinture, sculpture et gravure. Paris: Prault, 1792.

     

    La chanson de Brassens : Venus callipyge

     

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    88 commentaires

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    Portrait de deux fillettes, 1890-1892, par Auguste Renoir.


    Je vous invite à découvrir, dans le majestueux écrin de l'Orangerie des Tuileries, un florilège d'oeuvres exceptionnelles. Les personnes qui voudraient lire ou relire mon article consacré à l'histoire du bâtiment pourront le retrouver ici: Les Trésors de l'Orangerie, Chapitre Un.


    La lumière nous séduit dès que nous pénétrons dans ce bel espace. Elle irradie par les grandes verrières et cisèle avec grâce les murs de la vénérable bâtisse. Nos billets d'entrée dans la main, nous franchissons la passerelle menant aux Nymphéas, dans une atmosphère sereine et recueillie, comme si nous cheminions vers un lieu sacré.


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    Le matin, 1920-1926.


    Les Nymphéas composent une oeuvre unique en son genre, « offerte » par Claude Monet à la France, le 12 novembre 1918, et installée dans deux vastes salles ovales, d'après une scénographie imaginée par l'artiste.


    « Cher et grand ami, je suis à la veille de terminer deux panneaux décoratifs que je veux signer le jour de la victoire, et viens vous demander de les offrir à l'État par votre intermédiaire. » Lettre de Claude Monet à Georges Clémenceau, le 12 novembre 1918.


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    Les lieux forment une ellipse majestueuse qui accueille les gigantesques panneaux et trace, de manière panoramique, le signe de l'infini. Il y règne un doux éclairage, diffusé par les verrières zénithales.


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    L'acte de donation des Nymphéas à l'État fut signé le 12 avril 1922.


    Monet devait livrer les toiles dans un délai de deux ans et, malgré la cataracte dont il souffrait depuis longtemps, il persévéra avec un courage poignant. Hélas, quand les Nymphéas ouvrirent au public, en 1927, l'Impressionnisme avait perdu les faveurs des générations nouvelles.


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    Le matin aux saules


    De 1920 à 1927, l'architecte Camille Lefèvre effectua des travaux d'aménagement d'après les indications de Monet mais le dispositif de visite initial fut ravagé par un obus tombé dans la deuxième salle, en août 1945, et totalement déstructuré par une rénovation des plus hasardeuses dans les années 1960.


    Il fallut attendre l'essor de l'abstraction lyrique et la recréation subtile de l'espace intérieur, dans les années 2000-2006, pour que l'oeuvre retrouve la place qu'elle méritait.


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    Les deux saules et Matin clair aux saules.


    L'architecte Olivier Brochet a élaboré un espace consacré à la lumière. Le merveilleux jardin de Claude Monet s'offre dans la rondeur d'un espace où règne une intense clarté et le chemin qui y conduit est une passerelle fluide.


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    Le Bassin aux Nymphéas, harmonie verte, 1899.


    A l'hiver 1893, Monet fit aménager à Giverny, un village situé sur la rive droite de la Seine, aux confins de l'Ile de France et de la Normandie, un jardin d'eau chevauché par un petit pont. L'été suivant, il y cultiva des nymphéas et des iris du Japon. Dans un enchevêtrement d'arbres et d'arbustes, il conçut un monde féerique qui se voulait un « modèle réduit de l'univers ».


    Par l'intensité de la couleur et sa touche si particulière, il cherchait à saisir la fugacité d'un moment lumineux. Cueillir l'essence des effets de lumière et leurs variations sur des sujets comme l'eau, les feuilles, les façades ciselées de motifs constituait une expérience enchantée.


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    Le Bassin aux Nymphéas, harmonie rose, 1900.


    Sa quête des métamorphoses de la lumière s'exprima tout au long de sa vie, à travers les représentations des bords de Seine et des meules de foin, la description onirique des canaux vénitiens, les vues du Parlement de Londres ou de la cathédrale de Rouen.


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    Le bateau-atelier, 1874.


    Pendant l'été 1872, Monet aménagea un atelier flottant à Argenteuil. Installé dans cette barque cabanée, il étudiait à loisir les petites embarcations et leur reflets mouvants sur l'eau et saisissait la fugacité lumineuse des levers et des couchers de soleil.


    Il s'inspira de l'initiative de Charles-François Daubigny (1817-1878), peintre de l'École de Barbizon. Ce précurseur de l'Impressionnisme avait fait construire en 1844, le Bottin, un atelier flottant, pour peindre en toute tranquillité les bords de la Seine et de l'Oise.


    En 1989, le chantier naval du Guip, à l'Île-aux-Moines, a reconstruit le bateau-atelier de Monet pour célébrer le 150ème anniversaire de la naissance du peintre.


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    Meules de foin à la fin de l'été, effets du matin, 1890.


    Monet s'imposa comme le poète des formes voilées et des paysages changeants. Entre l'été 1890 et l'hiver 1891, il peignit les meules de foin qui se trouvaient dans un champ situé près de Giverny. La répétition du motif lui permit de décrire la ronde des effets de lumière et de tisser les variations de l'atmosphère.


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    Les Meules, effet de neige, 1890-1891.


    A travers cette première série, il expérimenta les cadrages et les impressions colorées.


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    Vue de Venise, 1908.


    Fasciné par les mystères et les merveilles de la Sérénissime, Monet réalisa de nombreuses vues de la lagune et des monuments qui s'y reflétaient. Il aimait s'installer dans une gondole et peindre au fil de l'eau les métamorphoses de la pierre, de la lumière et du ciel.


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    Le Parlement de Londres, 1904,
    reconstruit en 1834 par Sir Charles Barry et Auguste Pugin
    après la destruction de l'ancien palais de Westminster.


    Pendant ses séjours londoniens, Monet fut fasciné par la Tamise, ciselée de miroitements qui s'imprégnaient des couleurs des saisons et se modifiaient au gré des heures du jour et de la nuit. Depuis la fenêtre de sa chambre de l'hôtel Savoy, il fit de la lumière son sujet principal, retravaillant ensuite ses toiles dans son atelier de Giverny.


    La silhouette fantasmagorique du Parlement domine les mystérieux reflets qui déferlent sur la Tamise et Monet saisit l'harmonie vaporeuse du paysage urbain dans la brume. A force de capter l'instantané, les contours du sujet ne cessent d'évoluer et le regard du peintre aussi.


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    La cathédrale de Rouen, portail, temps gris,


    De 1892 à 1893, Monet peignit une série de trente tableaux qui représentaient des vues de la cathédrale Notre-Dame de Rouen. Il suivait le rythme des heures du jour, du bleu matinal ombré de brouillard aux feux mordorés du crépuscule.


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    La cathédrale de Rouen, le portail et la tour Saint-Romain,
    plein soleil, harmonie bleue et or
    , 1894.


    Ses travaux sur les vibrations de la lumière et la magie atmosphérique culminèrent avec les Nymphéas.


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    Reflets d'arbres


    La série se décline en presque trois cents toiles qui dessinent un fabuleux réceptacle de vie, de formes et de couleurs, au gré des heures diurnes et des saisons. Monet les peignit à la lumière naturelle, dans un immense atelier, conçu pour la circonstance, à Giverny.


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    Le grand atelier construit pour les Nymphéas.
    (Photo trouvée dans les archives du musée de l'Orangerie).


    Monet y installait ses toiles sur de puissants châssis dressés au ras du sol. Pour donner un côté miroitant à ses pigments, il les broyait avec de l'huile de lin et, chaque fois qu'il passait une couche de couleur sur la toile, il diminuait la quantité de liant afin que les pigments remontent davantage à la surface.


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    La course des nuages


    Le regard du spectateur est attiré vers une transmutation mystérieuse. Le secret friselis de l'eau fait naître un langage chromatique merveilleux et basculer la réalité dans un monde onirique.


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    Ce paysage d'eau où frissonnent les nymphéas, les reflets d'arbres, les branches de saules entrelacées, les fragments de ciel et de nuages, se déploie comme une farandole de songes emmêlés...


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    Les couleurs poudrées voltigent dans la lumière de l'aube ou du couchant,
    imprégnées du chant de l'eau et du bruissement de l'air dans les fleurs et les feuillages.


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    Les Nymphéas semblent s'inscrire dans un vaste cycle cosmique où les éléments se chevauchent. Toute conception classique du paysage est balayée par Monet qui explore les infinies possibilités de la lumière et de la couleur sur les surfaces mouvantes. L'étang devient, au fil des reflets et des ombres, un miroir aux émotions.


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    Le matin clair aux saules.


    De près, le regard est saisi par l'épaisseur et la virtuosité de la matière picturale mais dès que l'on prend du champ, les touches colorées recomposent l'image d'une nappe d'eau sans contours ni horizon.


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    Monet s'inspira des travaux du chimiste Michel-Eugène Chevreul (1786-1889) sur la perception des couleurs. Par la division des touches et la juxtaposition des couleurs complémentaires, comme le jaune et le violet, l'espace se modifie.


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    Le jardin est une entité vivante où la vie tisse ses mystères. Ses perspectives se renouvèlent, au rythme des saisons et des heures du jour. Les fleurs, les plantes, les rochers, la lumière et les ombres fusionnent dans une palette de formes fluides. Nymphéas, nuages, reflets, écorces et frondaisons dessinent un paysage enchanté, un monde intime où s'aventure le spectateur.


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    Soleil couchant


    Dans le contexte de la Première Guerre Mondiale, les Nymphéas représentaient un message de paix et de rêverie universelles. Loin du monde ravagé par la violence, l'homme pouvait prendre conscience d'évoluer dans une nature où chaque élément se fond dans le creuset des forces primitives.


    Après cette promenade enchantée, retraversons la passerelle et descendons vers une extension de l'Orangerie, creusée, lors des travaux des années 2000-2006, sous le jardin des Tuileries. Nous allons y découvrir la prestigieuse collection Jean Walter et Paul Guillaume.


    A l'entresol, la Librairie-Boutique de la Réunion des Musées Nationaux propose un vaste choix de cartes postales et d'ouvrages d'art, d'accessoires de papeterie et d'objets de décoration, un choix d'idées intéressantes pour de jolis cadeaux...


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    Le buste de Georges Clémenceau nous accueille. Sculpté par Auguste Rodin (1840-1917), il nous rappelle le rôle essentiel joué par le Père la Victoire (1841-1929) auprès de Claude Monet quand celui-ci peignait les Nymphéas.


    La Collection Jean Walter et Paul Guillaume


    Elle désigne un ensemble de 144 oeuvres et rend hommage au marchand et collectionneur d'art Paul Guillaume (1891-1934).


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    Paul Guillaume, Novo Pilota, 1915, par Amedeo Modigliani (1884-1920).


    A cette époque, Paul Guillaume fut l'un des premiers à croire au talent de Modigliani. Une forte amitié unit les deux hommes jusqu'à la mort de l'artiste.


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    Paul Guillaume, vers 1919-1920, par André Derain (1880-1954).


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    Paul Guillaume, 1930, par Kees Van Dongen (1877-1968). Ce portraitiste mondain, précurseur du Fauvisme, était apprécié pour sa peinture élégante et raffinée qui faisait jaillir l'émotion par les mouvements de la couleur.


    Paul Guillaume était employé dans un garage automobile quand il découvrit des sculptures africaines dans une cargaison de caoutchouc. Doté d'un tempérament audacieux, il les exposa dans la vitrine et ce décor atypique attira l'attention de Guillaume Apollinaire, le maître de la poésie moderne.


    Suite à cette rencontre déterminante, Paul Guillaume devint courtier en art et en février 1914, il ouvrit une petite galerie au 6, rue de Miromesnil. En 1917, il s'installa dans une galerie plus cossue, rue du Faubourg Saint-Honoré et en 1921, il s'implanta dans la rue La Boétie, l'épicentre du quartier des plus fameux marchands.


    Soutenu par son épouse Juliette Lacaze, alias Domenica, il devint l'un des plus célèbres marchands d'art de son époque et l'émanation d'un type inédit de collectionneur apparu à la fin du XIXe siècle, le marchand-collectionneur.


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    Portrait de Domenica, 1924, par Marie Laurencin (1883-1956).


    Les douces harmonies de gris et de rose se fondent dans un univers suave, emblématique du style de cette grande portraitiste.


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    Portrait de Madame Paul Guillaume au grand chapeau,
    vers 1928-1929, par André Derain.


    Une belle gamme de tons chauds (beiges, ocres et bruns rouges) amplifie l'élégance du sujet.


    Après la mort de Paul Guillaume, Domenica épousa un ami du couple, l'architecte et industriel Jean Walter. Elle compléta et modifia la collection avant de la céder à l'État en 1960.


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    Vers 1930, Paul Guillaume possédait un appartement, au 22, avenue Foch, où il exposait des tableaux prestigieux, comme en témoignent ces maquettes qui représentent le bureau et la salle à manger.


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    Le bureau


    On y aperçoit des objets africains et des sculptures signées Picasso et Modigliani...


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    L'Arlequin à la guitare d'André Derain, 1924, y figure en bonne place.


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    La salle à manger


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    Jusqu'à la fin de sa vie, Paul Guillaume fut un mécène particulièrement actif pour le peintre André Derain dont il admirait la réflexion esthétique et le sens aigu de la composition, entre simplification du dessin et force de l'expression.


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    L'Âge d'Or, vers 1938-1946.


    Derain élaborait des décors de théâtre et des cartons de tapisseries mais ce mystérieux Âge d'Or est la plus monumentale de ses créations. Il témoigne de ses nombreuses inspirations: les tapisseries du XVIIe siècle appelées « verdures », les représentations héraldiques de grands fauves, l'imagerie d'Épinal, les gravures de style « primitif » comme le chasseur d'Afrique où figurait un grand lion, les personnages du Douanier Rousseau...


    Avec de grands aplats de couleurs, jaillit un monde archaïque merveilleux où les hommes et les animaux vivent en toute sérénité. Le peintre utilise la technique du marouflage (elle consiste à à fixer du papier ou de la toile sur un support rigide: toile plus solide, bois, pan de mur avec une colle forte qui durcit en séchant).


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    Le reste de la collection se déploie dans plusieurs galeries baignées par une douce lumière, où contemplation et imagination s'entrelacent...


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    Argenteuil, 1875, par Claude Monet.


    En décembre 1871, Monet s'installa au nord ouest de Paris, avec sa famille. Située sur un des méandres de la Seine, Argenteuil avait été choisie pour accueillir les compétitions internationales de voile pendant l'Exposition Internationale de 1867. Ses célèbres régates et la douceur de vivre qui lui était associée attiraient de nombreux plaisanciers.


    Auguste Renoir, Alfred Sisley, Gustave Caillebotte et leur aîné Édouard Manet y retrouvèrent Monet qui peignit, aux alentours de 1875, une série de vues de voiliers au mouillage.


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    Le regard du spectateur est attiré vers les coques rouge vermillon qui « éclatent » parmi les nuances bleutées de l'eau et du ciel et le vert de la végétation aquatique, rehaussé par quelques touches blanches et outremer.


    Auguste Renoir: les charmes de la Période Nacrée, 1889-1919.


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    Bouquet de tulipes, vers 1905-1910.


    « Je peins pour peindre la joie de la couleur... »


    Dans sa période dite « nacrée », Auguste Renoir (1841-1919) peignit le bonheur des instants privilégiés, les douceurs de l'enfance, la beauté épanouie et la féminité triomphante. Face à la tendance à l'abstraction qui s'amplifiait, ses grands nus régénérèrent une veine souple, classique et sensuelle.


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    Baigneuse aux cheveux longs (vers 1895-1896).


    Grâce à une palette de couleurs lumineuses et d'ombres légères, l'artiste emporte le regard dans un fondu voluptueux.


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    Les chairs rosées fascinaient Renoir. Il passait de longs moments à contempler les roses, à la bonne saison, et conjuguait les tons des chairs féminines et la nacre vibrante et rosée des coquillages et des fleurs.


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    Baigneuse assise s'essuyant une jambe, vers 1914.


    La poésie des ombres bleues légères caresse les contours fugitifs et soyeux des tissus et des chairs. Sa période « nacrée » est l'expression de cette délicatesse picturale, fondée sur la rencontre entre volupté, formes pleines, ondulations de la lumière...


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    Femme à la lettre, vers 1890.


    Dans ce tableau ravissant, Renoir dévoile son admiration pour la peinture française du XVIIIe siècle. Le sujet et la touche, le cadrage resserré et la neutralité du fond évoquent les figures de fantaisie de Jean-Honoré Fragonard (1732-1806), saisies dans une activité artistique (lecture, musique, écriture).


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    La Liseuse, 1770.


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    Nature morte aux pêches, vers 1881-1882.


    Dans ses natures mortes, Renoir exprime le volume et la texture uniquement par le biais de la couleur.


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    Pommes et poires, 1890-1895.


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    Jeunes filles au piano, vers 1892.


    Cette huile sur toile est l'un des fleurons de la collection Jean Walter et Paul Guillaume. Elle marque un tournant dans l'oeuvre de Renoir car elle appartient à une série de tableaux qui lui valurent la reconnaissance des instances officielles. Commande de l'État certes mais surtout instantané délicieux d'un moment de bonheur.


    Le peintre nous plonge dans un intérieur bourgeois à l'ambiance feutrée où sa touche ondulante traduit une douce mélodie. Deux jeunes filles absorbées dans leur passion musicale, entre joie et songe, sont emportées par une envolée de notes suaves. L'une ferme à demi les yeux et l'autre déchiffre la partition avec gourmandise.


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    Renoir nous invite à caresser les étoffes, à suivre la lumière qui ruisselle sur les rubans, les chevelures et les courbes des visages.


    Il interprète d'une manière très personnelle le thème de la musique, fréquemment illustré dans la peinture du XVIIe siècle. Il transcrit l'émotion à travers le traitement du piano qui s'appuie sur un fond doux et mouvant, comme s'il s'agissait d'un paysage dans la brume.


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    Portrait de deux fillettes, 1890-1892.


    Nous retrouvons les mêmes modèles que pour les Jeunes filles au piano et des tonalités ressemblantes dans le traitement pictural, un ruban similaire dans la chevelure blonde et une robe quasiment identique pour la jeune fille brune qui arbore un chapeau de paille.


    Dans ce doux moment d'intimité mis en scène, Renoir exalte la beauté des chevelures et la coquetterie suave émanant de la fin de l'enfance (rubans, beaux tissus des robes...).


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    La Lecture, 1890.


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    Claude Renoir jouant, vers 1905.


    Renoir peint l'enfance avec la tendresse d'un père et le regard de l'homme qui se tourne vers un délicieux « âge d'or », pétri de rêves et de fantastiques royaumes.


    Ces toiles délicates ne reflètent pas le drame qui touchait l'artiste: de terribles crises d'arthrose déformant ses mains et lui provoquant d'atroces douleurs...


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    Claude Renoir en clown, 1909.


    Claude Renoir est son troisième et dernier enfant, né en 1901. Nous le retrouvons ici plus âgé, arborant un costume rouge de clown et un petit chapeau noir, devant deux grandes colonnes de marbre. Éloigné de la spontanéité de ses jeux, il n'appréciait pas particulièrement de prendre la pose pour satisfaire aux volontés de son père. Il dira, des années plus tard, que ses bas blancs le démangeaient et qu'il était bien difficile de rester immobile.


    Dans ce tableau monumental, Renoir exprime son attirance pour les jeux de lumière à la surface des tissus, les étoffes chatoyantes et l'art du déguisement. Il rend un hommage de fantaisie aux jeunes princes et aux infantes représentés par Diego Vélasquez (1599-1660), peintre du Siècle d'Or espagnol, et aux portraits de cour d'Antoine Van Dyck (1599-1641).


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    Fraises, vers 1905.


    A l'instar de Renoir, mais d'une autre manière, Paul Cézanne (1839-1906) s'imposa comme une figure tutélaire du « classicisme moderne » des années vingt en accordant à la forme et à la construction des paysages et des figures une importance majeure.


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    Nature morte, poire et pommes vertes, vers 1873.


    « Tout dans la nature se modèle selon la sphère, le cône et le cylindre. Il faut apprendre à peindre des figures simples, on pourra ensuite faire ce qu'on voudra. » Cézanne.


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    Dans le parc de Château Noir, 1898-1900.


    L'oeuvre nous attire dans un mystérieux paysage où aucun sentier ne semble exister. Le regard hésite entre le vide et l'impressionnante paroi rocheuse, dressée à gauche de l'image comme un rempart.


    Le volume est suscité par des facettes de couleur qui traduisent l'attachement du peintre pour la lumière et les âpres terres de Provence.


    Dans ces mondes où chante le silence et par des cadrages insolites, Cézanne décompose les formes en une profusion de traits et de taches vibrantes où la couleur éclate avec lyrisme et modernité.


    « La Nature pour nous hommes est plus en profondeur qu'en surface, d'où la nécessité d'introduire dans nos vibrations de lumière, représentées par les rouges et les jaunes, une somme suffisante de bleutés, pour faire sentir l'air. »


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    Dans le parc de Château Noir, 1898-1900 et Le Rocher rouge, 1895.


    Après le Fauvisme (1905-1906) et la Guerre, les peintres se tournèrent vers le volume et la perspective. Ainsi, dans les années 1920 et 1930, fleurirent les figures monumentales d'André Derain et de Pablo Picasso qui avait anticipé le phénomène dès les premières années du XXe siècle.


    L'influence de l'art antique se manifeste dans le Nu à la cruche de Derain et l'Étreinte de Picasso.


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    Le nu à la cruche, 1925.


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    L'Étreinte, 1903.


    Un homme et une jeune femme enceinte s'enlacent devant leur lit. Nous contemplons une des compositions de la Période Bleue de Picasso.


    Bleue car en 1901, disparut l'un des plus chers amis de l'artiste: le peintre barcelonais Carles Casagemas. De retour à Paris, Picasso s’installa dans l’atelier du défunt et exprima sa tristesse par de grandes coulées de lumière froide et une palette où dominaient les bleus.


    L'Étreinte met en scène deux amants confrontés aux difficultés de l'existence mais le vertige bleu qui les entoure est mêlé de notes rose pâle.


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    Odalisque à la culotte rouge, 1924-1925.


    A partir de 1918, les odalisques d'Henri Matisse (1869-1954) évoquent l'orientalisme de maîtres de la peinture comme Ingres, Delacroix et Renoir.


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    Odalisque bleue ou l'Esclave blanche, 1921-1923.


    Dans les années vingt, « avant garde » et « tradition » se réconcilièrent. Le corps féminin redevint la référence et les oeuvres des principaux artistes exaltèrent la beauté féminine dans sa plus pure volupté.


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    Le beau modèle, 1923, par André Derain


    En 1915, le poète Guillaume Apollinaire recommanda à Paul Guillaume différents peintres dont le « Douanier » Rousseau, Marie Laurencin et Amedeo Modigliani. Un courant primitiviste vit le jour, inspiré par un désir de se rapprocher d'une simplification « sacrée » du dessin et par l'engouement pour les sculptures africaines découvertes vers 1905 par Derain et Matisse.


    Les doux sortilèges de Marie Laurencin


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    Danseuses espagnoles, vers 1919.


    Celle qui devint, dans les années vingt, la portraitiste du tout Paris nous livre son interprétation du Cubisme avec des figures mêlant tracé délicat, pointes et brisures. La musique du songe émane des visages de ses héroïnes.


    Marie Laurencin naquit à Paris le 31 octobre 1883. Ses premières oeuvres furent influencées par les figures gracieuses des maîtres italiens et par le symbolisme où elle puisa une touche évanescente et mystérieuse.


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    Brillante et décidée à marquer de son empreinte le monde artistique de son époque, elle entra en 1904 à l'Académie Humbert où elle rencontra Georges Braque (1882-1963).


    Charmé par son talent, le pape du Cubisme l'introduisit auprès des artistes du Bateau-Lavoir, une vieille bâtisse de Montmartre qu'il partageait avec Picasso et de nombreux peintres, des comédiens et des poètes.


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    Apollinaire et ses amis, 1909.


    En 1907, au Salon des Indépendants où elle exposa pour la première fois, Marie fit la connaissance de Wilhem de Kostrowitsky, alias Guillaume Apollinaire (1880-1918) et vécut avec lui une passion dévorante.


    "Mon destin, ô Marie, est de vivre à vos pieds en redisant sans cesse ô combien je vous aime".


    Devenue sa muse et son égérie, elle posa à ses côtés pour une toile du Douanier Rousseau intitulée La Muse et son Poète.


    Accusée de ne pas être ressemblante, l'oeuvre fut très critiquée mais Apollinaire objecta:"Si je ne suis pas ressemblant comment m'avez vous reconnu?".


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    La Muse et son Poète par le Douanier Rousseau.


    Ils se séparèrent en 1912 mais la mort d'Apollinaire, victime en 1918 de l'épidémie de grippe espagnole, plongea la jeune femme dans un profond chagrin.


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    Femmes au chien, 1923.


    Avec Berthe Morisot (1841-1895), Marie Laurencin est une preuve de cette marge exquise où se meuvent les femmes autour du travail des hommes. Tandis que Matisse, Picasso, Braque, Apollinaire, Max Jacob, créaient un monde, Marie les accompagnait et mettait en liberté une foule de jeunes filles qui relèvent des Demoiselles d'Avignon de Picasso et des Petites Filles Modèles de Madame de Ségur-Rostopchine. Ces jeunes filles aux visages triangulaires de plâtre et de clair de lune, tenant des éventails pareils aux jalousies, regardant s'ébattre et se cabrer des chiens qui pourraient être biches ou licornes ou n'importe quel animal de fable". Jean Cocteau (1889-1963).


    Dans ce milieu profondément masculin, Marie, baptisée « Dame du Cubisme » apporta un vent de féminité et de sensibilité.


    Elle façonna un style empreint de douceur, élabora une palette de couleurs tendres et raffinées et rechercha davantage la nuance que l'expression. A partir de 1910, sa palette offrit de subtiles nuances de rose, de gris, de bleu tendre et de vert turquoise.


    « Je n'aimais pas toutes les couleurs. Alors pourquoi me servir de celles que je n'aimais pas? Résolument, je les mis de côté! »


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    Les Biches, 1923.


    En 1924, pour les Ballets Russes de Serge Diaghilev, elle composa les décors et les costumes du ballet les Biches sur un livret de Jean Cocteau et une musique de Francis Poulenc.


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    Portrait de Mademoiselle Coco Chanel, 1923.


    Dans le Paris des années vingt, elle devint l'artiste officielle du « milieu mondain ». Ses portraits se vendaient à prix d'or.


    Elle illustra de nombreux ouvrages et notamment Alice au pays des merveilles de Lewis Carroll.


    Poétesse, elle écrivit Le Carnet des Nuits, publié en 1942, dans lequel elle relate sa jeunesse et ses années d'apprentissage au Bateau-Lavoir.


    Elle disparut le 8 juin 1956 et fut inhumée au cimetière du Père Lachaise, vêtue de blanc, une rose à la main, les lettres d'Apollinaire sur son coeur...


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    Henri-Julien Félix Rousseau dit le Douanier Rousseau (1844-1910)

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    La fabrique de chaises à Alfortville, vers 1897 ou vers 1906-1908.


    Après la guerre de 1870, ce personnage atypique entra, comme commis de deuxième classe, à l’Octroi de Paris. On y percevait les taxes des marchandises qui entraient dans Paris.


    Le poète, romancier et dramaturge Alfred Jarry le surnomma «Douanier Rousseau» car il occupait le poste de «gardien des contrôles et des circulations du vin et de l'alcool».


    Il entama une carrière comme peintre autodidacte et l'obtention d'une carte de copiste au musée du Louvre lui permit d'étudier les chefs-d’œuvre. Hélas, son style empreint d'une candeur étrange, de nostalgie enfantine et d'exotisme stylisé suscita les moqueries et l'incompréhension.


    Il essaya, sans succès, d'exposer ses oeuvres au Salon officiel en 1885 mais il réussit à participer au Salon des Indépendants en 1886, en raison de l'absence de jury d'entrée.


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    La fabrique de chaises, vers 1897 ou vers 1906-1908.


    Au fil des années, il acquit l'estime de Derain et Matisse et se lia d'amitié avec Picasso et Apollinaire.


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    La Noce, vers 1905.


    Ce portrait de famille, qui semble inspiré d’une photographie, réunit quatre hommes et quatre femmes à l'occasion d'un mariage. Des personnages au regard étrangement figé paraissent flotter au-dessus du sol. Hormis les deux aïeux, les protagonistes de la scène n'ont pas vraiment d'âge.


    Profondément marqué par le spiritisme, Rousseau pensait que les esprits s'exprimaient à travers sa peinture. Est-ce le sujet de cette noce mystérieuse qui se déroule dans une forêt imprégnée par l'imaginaire des contes? Le chien, au premier plan, apparaît-il alors comme un gardien du voile séparant le monde des vivants et celui des défunts?


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    Dans cette galerie de portraits et de paysages variés, les oeuvres d'André Derain nous offrent une promenade d'une séduisante intensité.


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    Arlequin et Pierrot, 1924.


    A différentes époques, les peintres ont choisi d'illustrer des personnages de la Comedia dell’Arte. Ainsi Watteau, Renoir, Cézanne, Picasso... ont livré leurs versions de ces figures folkloriques recréées par le théâtre au fil du temps.


    Paul Guillaume commanda cette oeuvre monumentale pour sa collection privée.


    L'action se déroule dans un paysage désertique au fond duquel apparaissent des collines ondulantes et un grand pan de ciel coupé par une masse nuageuse.


    On aperçoit au premier plan, à droite, une nature morte composée d’un linge blanc sur lequel reposent un violon et son archet ainsi qu'une cruche, objets familier dans les tableaux de Derain. A gauche, jaillit une plante au feuillage souple et découpé.


    Arlequin et Pierrot se livrent à une étrange danse qui les déséquilibre vers l’avant du tableau, un peu comme s'ils allaient tomber sur le spectateur. Ils brandissent des instruments dénués de cordes et leur silencieuse musique crée un sentiment de solitude et de malaise.


    Derain donne une dimension tragique à ces deux « amuseurs » dont les visages hermétiques resteront repliés sur le mystère de leurs expressions. Mais il rend avant tout hommage à l'amitié qui l'unissait à Paul Guillaume, donnant à Pierrot les traits du collectionneur et reproduisant son propre visage dans celui d'Arlequin.


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    Le noir à la mandoline, vers 1930.


    Derain était un musicien autodidacte, féru de piano, d'orgue et de clavecin et passionné par les instruments à cordes et les cuivres. Il décorait les murs de ses ateliers avec des instruments de musique. Le thème du joueur de luth, de guitare ou de mandoline est récurrent dans son oeuvre.


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    Le gros arbre, vers 1929-1930.


    Après avoir été un des maîtres du Fauvisme, exaltant les couleurs pures, il revint à des formes « traditionnelles » et à une palette plus sombre, caractéristique de son goût pour la sculpture sur pierre et l'art africain.


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    Roses sur fond noir, vers 1932.


    Ce tableau tout en nuances fait référence aux Vanités du XVIIe siècle où le clair-obscur traduisait l'éphémère. La texture même du vase se fond dans l'obscurité, faisant apparaître un sillage scintillant.


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    Roses dans un vase, Auguste Renoir.


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    Fleurs dans un vase, 1896-1898, Auguste Renoir.


    Notre promenade s'achève sur ces notes poétiques et fleuries mais je vous invite à poursuivre cette visite de l'Orangerie dans un troisième chapitre. Nous découvrirons alors les peintres de Montmartre, les vestiges archéologiques conservés dans la structure du bâtiment et les beautés de l'exposition consacrée à Claude Debussy et aux peintres préraphaélites. A très bientôt...


    Bibliographie


    Georges CLÉMENCEAU: Claude Monet, Les Nymphéas. Éditions Omnia, 2010.
    (Ce livre témoigne de l'amitié unissant le peintre et l'homme d'état et décrit leur correspondance )

     

     

    Regards sur les Nymphéas: De Paul Claudel à André Masson.

     

    Daniel MARCHESSEAU: Marie Laurencin, Catalogue raisonné de l'oeuvre peint, deux volumes. Tokyo: éditions Musée Marie Laurencin, 1985-1999.


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    93 commentaires
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    En ce Printemps capricieux, je vous invite à franchir les grilles du Jardin des Tuileries et à vous diriger, sous les magnifiques voûtes de verdure, vers le Musée de l'Orangerie.

     

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    Marronniers et tilleuls dessinent, sur notre parcours, une luxuriante forêt...

     

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    L'Orangerie est ce bâtiment tout en longueur, remarquable d'élégance et de sobriété, qui se dresse face à la Place de la Concorde, à l'extrémité occidentale de la Terrasse du Bord de l'Eau. Il accueille une sélection raffinée de peintures impressionnistes et post-impressionnistes et forme un écrin privilégié pour les célèbres Nymphéas de Claude Monet.

     

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    La Terrasse du Bord de l'Eau domine, d'un côté, la Seine et ses quais ombragés et, de l'autre, de ravissants parterres fleuris.

     

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    Dans ce monde « en vert », s'épanouissent de délicats orangers, réminiscences de ceux qui peuplèrent, pendant des siècles, l'allée centrale du jardin.

     

    A la Belle-Époque, l'Allée des Orangers formait une promenade particulièrement prisée. Bordée de grands marronniers, elle constituait une galerie d'exposition à ciel ouvert pour les Parisiennes qui y déployaient leurs accessoires de mode. Les jeunes gens s'y donnaient rendez-vous sous les frondaisons parfumées. Ils venaient y « sourire à des amours écloses l'hiver; sous les lustres, et maintenant épanouies au sein de la verdure, sous les brises embaumées du Printemps. » Edmond Texier: Tableau de Paris, 1852-1853.

     

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    Originaire de Chine, l'oranger (citrus sinensis), pénétra en Europe à l'époque des Croisades (XIe-XIIIe siècle), par la voie méditerranéenne. De la Perse au Bassin Méditerranéen, l'orange amère ou bigarade parvint en Sicile et se diffusa ensuite dans le reste de l'Europe. L'orange douce fut découverte en Chine au XVIe siècle par les navigateurs portugais qui la rapportèrent en Europe.

     

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    L'orange est associée au mythe du Jardin des Hespérides. Dans ce merveilleux jardin, situé à l'Extrême-Occident, au bord de l'Océan, coulaient des sources d'ambroisie destinées aux dieux. Un arbre fabuleux, porteur de « fruits d'or », s'y épanouissait, sous la garde d'un dragon à cent têtes, appelé Ladon et des gracieuses Hespérides.

     

    Selon les mythes et les auteurs, les Hespérides étaient les filles d'Hesperus, le Couchant personnifié, ou celles du géant Atlas et de Nyx, la déesse de la Nuit. Les anciens récits les considèrent comme les filles de la Nuitet de l'Érèbe, les Ténèbres primordiales ou du Titan Phorcys, « le Monstrueux », divinité de la mer profonde et de Céto, la Sirène originelle...

     

    Elles veillaient sur les précieuses pommes d'or, symboles d'immortalité, scintillant comme les étoiles dans le ciel.

     

    L'arbre était un présent de Gaïa, la terre mère, à Héra, la reine des dieux, lors de son mariage.

     

    Le héros grec Héraclès pénétra dans le jardin pour dérober les fameux fruits, pommes de lumière assimilées aux luxuriantes oranges...

     

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    Héraclès et les Hespérides, villa Albani à Rome.

     

    L'orange est un symbole de fécondité, de protection et de prospérité. Fruit précieux donné comme cadeau de Noël aux enfants, à la Belle-Époque, dans l'Entre-Deux-Guerres et après...

     

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    La fleur d'oranger était offerte, sous forme de couronnes parfumées, aux jeunes mariées.

     

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    L'Orangerie fut érigée à partir de 1853, sur les plans de Firmin Bourgeois, pour accueillir les orangers des Tuileries, entreposés jusque là dans une galerie du Louvre. Ludovico Visconti (1791-1853), architecte de l'empereur Napoléon III, termina la construction de ce grand vaisseau de pierre.

     

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    Ses lignes classiques s'harmonisent avec celles des grands Hôtels de la Place de la Concorde (l'Hôtel de Crillon et l'Hôtel de la Marine).

     

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    Une orangerie est traditionnellement un bâtiment clos, doté de vastes fenêtres tournées vers le Sud. Il y règne une température agréable et bien régulée. Les agrumes en bacs ou en pots et les végétaux fragiles, comme les palmiers, y sont protégés contre le gel.

     

    La mode des orangeries date de la Renaissance et vient d'Italie. Les orangers étaient gardés, à l'abri des intempéries, dans des « limonaiae ».

     

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    Pendant la IIIe République, l'Orangerie des Tuileries fut transformée en salle de concert et en lieu d'exposition pour du matériel industriel et horticole, des objets artisanaux et des chiens de race. Elle accueillit, pendant la Première Guerre Mondiale, des soldats mobilisés et servit de dépôt d'armement.

     

    Elle fut attribuée, en 1921, à l'administration des Beaux-Arts et destinée, comme son pendant, le Jeu de Paume, à devenir une annexe du Musée du Luxembourg. Mais Georges Clémenceau (1841-1929) proposa à Claude Monet (1840-1926) d'y installer Les Nymphéas et, le 17 mai 1927, le Musée de l'Orangerie ouvrit ses portes.

     

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    A l'est et à l'ouest, les portes monumentales sont surmontées de frontons qui décrivent des sujets agricoles, sculptés par Gallois-Poignant, un des artistes du Louvre de Napoléon III (1808-1873).

     

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    Les orangers d'aujourd'hui passent l'hiver dans l'Orangerie de Meudon. Ils s'épanouissent aux Tuileries pendant les beaux jours.

     

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    Des sculptures d'époques variées contemplent l'écrin verdoyant du jardin et la forêt de petits agrumes.

     

    bImage22.jpg Cette étrange silhouette, appelée Reclining Figure, accueille le visiteur au pied de l'escalier menant à la Terrasse du Bord de l'Eau. Création du sculpteur Henry Moore (1898-1986), elle date de 1951.

     

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    Sa peau de bronze, scintillante après l'averse, est sublimée par les variations de la lumière.

     

    L'art contemporain semble parfois hermétique ou peut ne pas correspondre à l'idée que l'on se fait du « beau » mais le pouvoir de l'imaginaire moderne nous réserve bien des surprises.

     

    Ainsi, cette statue mystérieuse, récurrente dans l'oeuvre d'Henry Moore, évoque une sculpture maya appelée Chac Mool.

     

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    En 1925, l'artiste découvrit au cours d'une exposition parisienne une des versions du Chac Mool. Il la déclinera, sous des formes particulières, tout au long de sa vie, avec les Reclining Figures.

     

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    La lumière entre dans les cavités de ces corps étranges, passerelles entre les mondes anciens et l'écriture de la modernité. Cet art mystérieux nous fait osciller entre les royaumes mayas et les paysages enchantés du Yorkshire, comté d'Angleterre, où naquit l'artiste.

     

    Henry Moore réinterpréta des figures emblématiques des civilisations anciennes et façonna des bronzes abstraits monumentaux liés, de manière sensuelle, maternelle et mystique, à la féminité.

     

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    Les formes organiques et les divinités des mondes lointains ont constitué pour lui une source d'inspiration majeure.

     

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    Fascinants Chac Mool

     

    Bien qu'on la rencontre ailleurs, cette figure sacrée est très présente à Chichén Itzá, une ancienne ville toltèque et maya, considérée comme le principal centre religieux du Yucatán.

     

    La cité s'est développée autour de deux puits naturels, appelés cenotes. Imprégnée de mystère, elle est associée aux forces calendaires, aux puissances guerrières et aux divinités aquatiques.

     

    Le nom même de Chichén Itzá révèle cette présence « sacrée » de l'eau. Chi signifie bouche, Chén évoque le puits et Itzá désigne le sorcier de l'eau. On y honorait Chac, le dieu de la pluie, appelé Tlaloc par les Aztèques.

     

    Des sacrifices étaient offerts au seigneur de l'eau. Les avis des historiens diffèrent au sujet des victimes précipitées au fond des cenotes sacrés: jeunes gens vierges, enfants morts très jeunes, prisonniers capturés lors de raids dans des cités rivales... Les « infortunés » étaient purifiés dans un bain de vapeur (temazcal) avant d'être jetés au fond des puits avec des offrandes: perles de jade, petits miroirs de pyrite, boules de copal, cristaux, figurines en forme de jaguar et de serpent...

     

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    Inventé en 1875 par l'explorateur Auguste Le Plongeon, le terme Chac Mool signifie « Grand Jaguar Rouge » en maya yucatèque. Ce personnage de pierre est appuyé sur les coudes, dans une position demi couchée. Un plateau destiné à recevoir le coeur des sacrifiés repose sur son ventre.

     

    Médiateur entre les hommes et les dieux, il se dresse au sommet du Temple des Guerriers Jaguar, précédant deux superbes piliers posés sur deux têtes de serpents géants.

     

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    (Image trouvée sur le site Mexico Travel.)

     

    Chac, Chaac ou Chaahk, frappe les nuages avec sa hache de foudre pour susciter le tonnerre et la pluie. A l'instar d'autres dieux mayas, il est à la fois un et multiple. Chaque point cardinal est associé à un Chac. Un rouge se situe à l'est, un blanc au nord, un jaune au sud et un noir à l'ouest.

     

    Chac et ses avatars, les faiseurs de pluie, heurtent avec leurs haches de silex ou de foudre les serpents célestes qui crachent la pluie.

     

    Protecteur des cultures et gardien des montagnes sacrées dans lesquelles le maïs a été dissimulé, Chac est un dieu de la fécondité, veillant sur les jeunes filles en âge de concevoir.

     

    Il revêt parfois le masque de Tlaloc, le dieu aztèque de la pluie et de la végétation, pourvu de crocs allongés et de grands yeux ronds entourés de serpents.

     

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      Le Chac Mool du Templo Mayor à Mexico. Au lieu du plateau rituel, il tient un cuanhxicalli ou « réceptacle de l'aigle », vase sacré destiné à recevoir le coeur des sacrifiés.

     

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    Le Chac Mool est le gardien des mystères de la pluie et de l'orage fécondant. Il préside à la métamorphose du guerrier en jaguar, animal sacré de la Mésoamérique. Conteur silencieux, il nous fait cheminer vers le splendeurs de la Grande Pyramide de Chichén Itzá, précédant les 364 marches qui convergent vers le plateau central, représentation grandiose des 365 jours de l'année.

     

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    Lors des deux équinoxes, le soleil dessine un étonnant jeu d'ombre à la surface des escaliers et façonne le corps fantastique du Quetzalcoatl ou Kukulkan, le Serpent à Plumes.

     

    Cette figure initiatique a profondément inspiré Henry Moore.

     

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    L'artiste l'a féminisée et a fait jaillir de blocs de pierre, de bois ou de métal, de grandes formes étendues, réceptacles de puissance et de fécondité.

     

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    Entre vallées profondes et excavations énigmatiques, cavités et réseaux de veines multiples, la magie serpente, nous rappelant que tout art renferme une dimension sacrée.

     

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    L'art d'Henry Moore établit un lien intime avec les formes prénatales. Il sublime la mort et la vie, la courbe, le creux et la maternité. Les volumes ondulants font référence au corps du dieu maya de la pluie que l'artiste a réinterprété en le dotant d'attributs féminins.

     

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    Fasciné par les éléments organiques et les êtres en métamorphose, Henry Moore est également connu pour sa collection « d'éléments ramassés »: coquillages, bois flottés, silex, crânes, os et squelettes de divers animaux...

     

    Émanation des forces primitives, sa Reclining Figure trône depuis l'an 2000 au pied de l'Orangerie. Elle a remplacé L'Hommage à Cézanne, une sculpture d'Aristide Maillol datant de 1912.

     

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      La belle nymphe en plomb offre aux promeneurs ses lignes épurées.

     

    Aristide Maillol (1861-1944) élabora des sculptures monumentales évoquant la statuaire grecque archaïque mais ouvrant, par leur volonté de rupture avec l'art descriptif du XIXe siècle, la voie vers l'abstraction.

     

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    Habillés de verdure, les abords du Musée de l'Orangerie composent une séduisante promenade peuplée de sculptures hétéroclites. Lovons-nous, pour mieux les apprécier, sous les tilleuls aux frondaisons sucrées...

     

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     Ce lion farouche, aux prises avec un serpent qui ne résistera pas longtemps à ses féroces mâchoires est l'oeuvre d'Antoine-Louis Barye (1795-1875), artiste romantique, célèbre pour ses tableaux et ses sculptures de grands fauves.

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    En compagnie de son ami Eugène Delacroix, Antoine Barye étudia les animaux exotiques au Jardin des Plantes et réalisa des croquis sur nature qu'il traduisit dans la peinture et la sculpture. En 1833, Louis-Philippe lui commanda Le Lion au serpent, pour le Jardin des Tuileries. Cet animal rugissant est une allégorie de la Monarchie écrasant la sédition, trois ans après les sanglantes émeutes de 1830.

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    L'animal que nous contemplons est une copie du lion en bronze original, conservé au Musée du Louvre.

     

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    En 1846, Louis-Philippe passa commande à Antoine Barye d'un pendant pour Le Lion au serpent. Le magnifique Lion assis fut terminé en 1847 et placé en 1867 sur le Quai des Tuileries, à l'entrée du Guichet de l'Empereur.

     

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    On lui adjoignit un « jumeau » et les deux fauves formèrent les gardiens majestueux de la Porte des Lions.

     

    Ce prédateur magnifique incarne la majesté et la sérénité. Le traitement romantique de son expression le fait tendre vers l'anthropomorphisme.

     

    aImage44 Ce lion farouche offre un contraste saisissant avec celui de Giuseppe Franchi (1731-1806).

     

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    Un élégant lion de marbre, emblème héraldique, réalisé en 1806 d'après l'antique, et installé en 1819 face à la Place de la Concorde.

     

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    (Vous pouvez cliquer ici pour consulter mon article sur la Place de la Concorde.)

     

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    Il est un endroit que j'aime particulièrement...

     

    De l'autre côté de l'Orangerie, vers les bassins fleuris bordant le bassin octogonal des Tuileries, trois statues d'Auguste Rodin (1840-1917) se dressent sur une vaste pelouse.

     

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    « L'Homme d'Airain » nous livre un florilège de son art: Ève(1881-vers 1899), Méditation avec bras (1881-vers 1905) et L'Ombre(1881-vers 1904).

     

     

    aImage49.jpg Ève est l'incarnation de la féminité universelle. Ses attitudes sont à la fois sensuelles et retenues; ses courbes, des torrents de lumière.

     

    aImage50.jpg Son corps est une offrande qui semble jaillir du rocher.

     

    Rodin a exalté la femme en création et la mère en devenir. Le modèle choisi était une ravissante italienne, surnommée la « panthère » par l'artiste. Au fil des séances de pose, Rodin, insatisfait, modifiait constamment ses volumes jusqu'à ce que la jeune femme lui révèle qu'elle était enceinte. Il choisit alors de laisser l'oeuvre inachevée, dans sa beauté brute et voluptueuse...

     

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    La Méditation ou la Voix intérieure fut créée en hommage à un recueil poétique de Victor Hugo.

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    Dansante et repliée sur elle-même, sereine et cependant tendue, elle exprime un mouvement secret, un état particulier de réflexion qui nous attire vers les songes...

     

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    L'Ombre ou Adam, tout en virtuosité, reflète le chaos qui habite le personnage après son exclusion du Jardin d'Eden. Dans l'oeuvre alchimique de Rodin, le corps sensuel épouse les convulsions de l'esprit...

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    L'artiste crée une mosaïque de tensions et de formes apaisées, comme les pleins et les déliés d'une magistrale écriture.

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    La musculature de ses personnages impressionna tant ses contemporains que certains l'accusèrent de mouler ses sculptures sur modèle vivant (surmoulage).

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    Une liberté créatrice intense, quasi-pulsionnelle, caractérise l'art de Rodin. Son travail sur l'anatomie et la matière est le fruit d'une écriture très personnelle. Celle-ci explore des courants anciens, comme le maniérisme, et rend hommage au génie créateur de Michel-Ange.

     

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    La vie de Rodin fut une suite de luttes et de défis. Atteint d'une forte myopie, il fit des études médiocres mais développa, de manière très intime, son sens du toucher. Il apprit la sculpture auprès de maîtres comme Antoine-Louis Barye et Albert-Ernest Carrier-Belleuse mais échoua au concours d'entrée de l'École des Beaux-Arts. Il fut recalé trois fois à l'épreuve de sculpture en raison d'un style trop éloigné des conventions néo-classiques mais il fut engagé dans plusieurs ateliers.

     

    Son amour des femmes et ses nombreux voyages (Belgique, Italie, Angleterre...) nourrirent son inspiration. La postérité retint surtout le nom de Rose Beuret, (modèle, maîtresse et épouse) et de l'infortunée Camille Claudel...

     

    La passion de l'art et de la vie émane de chacune de ses créations. En 1877, il présenta l'Âge d'Airain, une sculpture si novatrice qu'il fut accusé d'avoir pratiqué un moulage sur modèle, mais l'oeuvre marqua le début de sa carrière d'artiste « reconnu ».

     

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    L'Homme d'Airain ou l'Homme qui se réveille...

     

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    La Porte de l'Enfer (1880-1917) apparaît comme une compilation grandiose de plusieurs de ses créations.

     

    Ève et Adam encadrent l'oeuvre monumentale. La Divine Comédie de Dante (1265-1321), voyage allégorique à travers l'Enfer, le Purgatoire et le Paradis, a enflammé l'esprit de Rodin.

     

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    Il s'est souvenu de la Porte du Paradis, merveille de bronze doré signée Lorenzo Ghiberti(1378-1455), pour le baptistère de Florence.

     

    La Porte de l'Enfer est couronnée par les Trois Ombres qui représentent une triple version d'Adam.

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    Les Trois Ombres au Musée Rodin.

     

    La réunion de ces trois figures forme une vision instantanée de la même oeuvre sous des profils différents. Elles ont été présentées à l'Exposition Rodin de 1900 sous le titre « Les Vaincus ».

     

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     Avant de poursuivre mon chemin, mon regard est attiré par ce personnage à la faucille qui couronne une des grandes fenêtres de l'Orangerie. Il tient l'attribut de la terre nourricière et des dieux des moissons.

     

    Emblème de mort et de renaissance, d'espoir et de fertilité, la faucille est liée au sang de la terre et revêt la forme du croissant lunaire.

     

    Dans la mythologie grecque, Gaïa, la Terre, façonne une faucille de silex pour castrer son époux Ouranos, le Ciel. Le couple divin avait engendré les Titans, les Titanides, les Cyclopes et les Hécatonchires, redoutables créatures dotées de cent bras et de cinquante têtes. Effrayé par sa progéniture, Ouranos la fit enfermer au fond du Tartare, lieu de désolation, mais Gaïa en prit ombrage. Elle remit la faucille à Chronos, son plus jeune fils, afin qu'il castre son père.

    Le sang et la semence jaillirent, engendrant les Géants, les terrifiantes Erinyes, les Nymphes et la voluptueuse Aphrodite, déesse de l'amour...

     

    La faucille est imprégnée de cette charge symbolique et mythologique. Elle représente le courage et la paysannerie, comme sur le drapeau soviétique.

     

    Au Japon, où elle est considérée comme sacrée et protectrice contre la foudre, on la place sur le toit des maisons.

     

    L'Orme de l'Orangerie et le Grand Commandement Blanc

     

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    Près de l'entrée du musée, ce grand arbre au port majestueux, un Orme champêtre (Ulmus procera), étire son feuillage vers le ciel.

     

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    Il est un des très rares rescapés de la graphiose, maladie qui décima, en 1980, la quasi-totalité des ormes de Paris.

     

    Sous les règnes de François Ier et d'Henri IV, de nombreux ormes furent plantés dans l'espace urbain, autour des fermes et des châteaux. Au XVIIe siècle, l'orme était la première essence d'arbre dans la capitale.

     

    Dans la Grèce antique, l'orme était l'arbre d'Hermès, le messager des dieux, maître de l'alchimie, gardien des routes et des carrefours. On l'associait aussi à Oneiros, le dieu des songes et de la nuit mystérieuse.

    Pour les anciens Nordiques, l'orme était lié à Embla, la première femme, amante de Ask, le frêne.

     

    L'orme est un arbre vénéré car on rendait autrefois la justice sous ses branches. Les traces de cet usage demeurent dans le quartier du Marais, près de l'église Saint-Gervais-Saint-Protais. (A découvrir dans un prochain article...)

     

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    De curieuses formes blanches se lovent sous son ombrage.

     

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    Cette oeuvre d'Alain Kirili, qui date de 1985, se nomme le Grand Commandement Blanc.

     

    Il s'agit d'un champ de signes abstraits, mélange d'alphabet et de formes géométriques évoquant des sortes de « cadrans solaires » qui projettent, à certaines heures de la journée, leurs ombres sur la pelouse. Ces mystérieuses polices de caractères en relief ont été installées à cet endroit en 2000. Elles sont en acier soudé et en peinture polyuréthane.

     

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    Notre promenade autour de l'Orangerie se termine en compagnie du Baiser d'Auguste Rodin. L'érotisme triomphant de l'oeuvre l'a rendue célèbre dans le monde entier.

     

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    Le thème du couple est majeur et inépuisable dans l'oeuvre de l'artiste. A l'origine, le Baiser est une sculpture en marbre d'un couple enlacé, réalisé à la demande de l'État Français pour l'Exposition Universelle de 1889.

     

    Le groupe devait décrire les tragiques amours de Paolo et de Francesca, issues de la Divine Comédie de Dante. Les amants furent assassinés par le mari de Francesca pendant qu'ils lisaient la légende arthurienne de la reine Guenièvre et du chevalier Lancelot.

     

    Face à la plénitude de la composition, Rodin renonça à placer les amants sur la Porte de l'Enfer. Le Baiser vola en quelques sorte de ses propres ailes et fut commandé dans de nombreuses versions.

     

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    Après une exposition à succès au Salon de Paris en 1898, le fondeur Ferdinand Barbedienne proposa à Rodin un contrat pour exécuter des réductions en bronze de son chef-d'oeuvre.

     

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    Le Baiser est l'apothéose du sentiment amoureux. Les amants fusionnent dans ce corps à corps d'une beauté inouïe. Leurs lèvres se donnent, s'épousent et leurs formes se dévoilent avec un bonheur émerveillé. L'impudicité dont Rodin fut accusé en son temps n'a heureusement plus cours aujourd'hui!

     

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    L'oeuvre aimante, fascine et fait jaillir l'émotion. Sous la voûte de feuilles, le spectacle des amants est un pur ravissement.

     

    Je vous laisse savourer ce délicieux Baiser et vous donne rendez-vous dans quelques jours pour la visite intérieure de l'Orangerie. Les célèbres Nymphéas de Claude Monet et les charmes de l'univers impressionniste seront à l'honneur. A bientôt...

     

    Bibliographie

     

    Jean-Pierre DELARGE: Dictionnaire des arts plastiques modernes et contemporains. Paris: Gründ, 2001.

     

    Pierre KJELLBERG: Le nouveau guide des statues de Paris. Paris: la Bibliothèque des Arts, 1988.

     

    François NOËL: Dictionnaire de la fable ou Mythologie grecque, latine, égyptienne, celtique.Paris: Le Normant, 1810;

     

    Gustave PESSARD: Nouveau dictionnaire historique de Paris.Paris: Lejay, 1904.

     

    Félix DE ROCHEGUDE: Promenades dans toutes les rues de Paris. Paris: Hachette, 1910.

     

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