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Par maplumefee le 22 Février 2016 à 21:44
Jules Joseph Lefebvre (1836-1911), Diana, 1879.
Elle se cache sous la horde des nuages mais son pouvoir d'eau et de fièvre est bel et bien réveillé. Pleine lune de février qui éclot, voluptueusement, dans la tempête... Je voulais lui consacrer un article illustré d'une série de tableaux mais comme certains d'entre vous le savent, je bataille avec ma connexion Internet. Dire qu'elle est fluctuante est un euphémisme !
Diana, seconde version.
Portraitiste et peintre de genre, également professeur à l'École des Beaux-Arts, Jules Joseph Lefebvre puisa son inspiration parmi les nus italiens de la Renaissance. Au cœur de sa palette opalescente, la femme est à la fois déesse de l'Antiquité (Diana, Luna...), héroïne du folklore et de la littérature (Lady Godiva), allégorie aux charmes mystérieux (La Vérité...), odalisque ou nymphe du printemps et de l'été.
Le tableau qui suit m'enveloppe de sa magie dès que je le contemple. Il m'évoque un monde secret, une sorte d'entre-deux accessible quand on se perd dans la nuit ou qu'on divague sur des chemins nacrés.
Thomas Cole (1801-1848), Moonlight, 1834. Collection of the New York Historical Society.
Peintre américain d'origine anglaise, Thomas Cole était le fondateur de l'Hudson River School, mouvement qui traduisait une vision romantique de l'art, la passion des grands espaces et des merveilles naturelles (à l'instar des Montagnes Rocheuses) et le désir de sublimer l'ensemble par un travail très approfondi, quasi mystique, sur la lumière.
Il aimait peindre des paysages réels (notamment ceux des montagnes Catskill situées au nord de l'État de New York), avec un remarquable souci du détail, en y mêlant toujours quelque chose d'imaginaire et de mystérieux. Ainsi, dans ce théâtre de nature où s'opèrent de puissants contrastes d'ombre et de lumière, où la figure humaine apparaît minuscule, la lune se dévoile comme un bijou, un soleil de nuit visible par certains initiés...
J'aurais aimé continuer à discuter de peinture et de « visions lunaires » avec vous mais je dois attendre de retrouver un meilleur débit Internet. J'ai pu me connecter sur quelques blogs mais il m'a fallu un temps fou pour y arriver et certains commentaires se sont perdus dans les limbes du net alors je n'insiste pas davantage.
A très bientôt, je pense à vous...
Cendrine
166 commentaires -
Par maplumefee le 2 Septembre 2015 à 20:44
Ce monument majestueux, qui rend hommage à Jules Ferry (1832-1893), se love dans l'écrin du jardin des Tuileries, à proximité de la rue de Rivoli et de la place des Pyramides. Il fut érigé à l'initiative de la Ligue de l'Enseignement, fondée en 1866 par Jean Macé (1815-1894).
Dans le but d'exalter les forces vives de la République, les membres de la Ligue organisèrent une souscription auprès des enfants des écoles afin d'honorer « celui avait tant fait pour l'éducation et qui avait été profondément critiqué pour son action coloniale. »
Le monument, inauguré le 20 novembre 1910, fut réalisé par le sculpteur Gustave Michel et l'architecte Charles Blondel.
Jules Ferry se dresse au sommet du monument pour énoncer les lois laïques pendant que Marianne ou l'Instruction soulève le voile de l'Ignorance. Une institutrice, considérée comme l'un des piliers de la Nation, saisit la main d'un jeune garçon. Appuyée sur un globe terrestre, elle tient un livre, en référence au mot fameux de Victor Hugo : « Ceci tuera cela ».
Cette sentence fut prononcée par l’archidiacre Claude Frollo, personnage du roman Notre-Dame de Paris. « Ceci tuera cela » que l'on pourrait aussi traduire par « Le livre va tuer l’édifice », est une allusion directe à l’invention de l’imprimerie (entre 1452 et 1456, bien que les Chinois aient été, au IIIe siècle de notre ère, les précurseurs de cette technique qui s'est imposée comme un événement majeur de l’histoire humaine). La « Bible de Plomb », initiée par Johannes Gutenberg (vers 1400-1468), supplante donc la « Bible de Pierre » qui s'adresse d'une autre manière au regard et à l'esprit. La révolution des mots et du papier accompagne la mise en place d'un rapport nouveau entre le lecteur et sa pensée.
Sur l'autre face du monument, le Génie de la République soutient le drapeau et arbore le rameau de la paix.
Jules Ferry disait souvent qu'il préférait voir les enfants à l'école plutôt qu'au service militaire.
Son portrait, par Félix Nadar (1832-1893).
Jules Ferry naquit à Saint-Dié dans les Vosges, le 5 avril 1832. Après avoir étudié le droit, il s’inscrivit au barreau de Paris mais il préféra s'orienter vers une carrière de journaliste d’opposition. Un article intitulé « Les comptes fantastiques d’Haussmann », qui parut dans le journal « Le Temps », le fit connaître du public.
Sa carrière politique débuta par son élection, en 1869, comme député de la 6ème circonscription de la Seine et s'affirma par son opposition à la déclaration de guerre contre la Prusse.
Après la défaite de Sedan, le 1er septembre 1870, il devint maire de Paris et reçut le surnom de « Ferry la famine » en raison des restrictions alimentaires qu'il dut exiger.
Il quitta la capitale pour Versailles pendant la Commune et fut élu député des Vosges, le 8 février 1871. Violemment opposé aux conservateurs, ses engagements firent de lui « une figure majeure de l'opposition en France, avec Gambetta et Grévy, et le chef de la Gauche Républicaine ».
Nommé, le 4 février 1879 et jusqu’en novembre 1883, ministre de l’Instruction publique et des Beaux Arts, par le président Jules Grévy, il exerça aussi la fonction de président du Conseil et de ministre des affaires étrangères.
Après avoir cristallisé les réactions négatives, notamment dans le camp de la droite et de l'extrême-gauche, sa politique coloniale lui fit essuyer un échec aux élections présidentielles de 1887. Quelques jours après le passage aux urnes, il fut victime d'un attentat au Palais-Bourbon.
Il fut battu aux élections législatives de 1889 mais élu au Sénat en 1891. Il présida la commission des Douanes et la commission de l’Algérie et devint, en 1893, Président du Sénat dès le premier tour, en dépit de relations houleuses avec des membres de la haute assemblée. Une crise cardiaque l'emporta le 17 mars 1893.
Controversé pour ses idées colonialistes, Jules Ferry est resté dans les mémoires grâce à ses engagements concernant l'instruction publique et l'enseignement supérieur. Désireux d'ouvrir l'école aux jeunes filles et aux écoliers issus des familles les plus modestes tout en empêchant les congrégations religieuses de prodiguer des formes de savoir dogmatique, il initia des réformes décisives pour l'avènement de la laïcité. Malgré l'avis défavorable d'une partie de l'opinion publique et de certains parlementaires, il parvint à faire voter, entre 1881 et 1884, plusieurs lois concernant la gratuité (juin 1881), l'obligation scolaire, entre 6 et 13 ans, et la laïcité de l'enseignement des jeunes filles et de tous les écoliers (mars 1882). Il s'impliqua aussi dans la fondation d'une École Normale de jeunes filles à Sèvres.
Il justifia son action coloniale par la nécessité d’œuvrer pour l'éducation des peuples et la volonté de porter la lumière de la civilisation française en Europe et partout dans le monde.
Je vous propose maintenant de lire un texte issu du Petit Parisien, journal quotidien du soir publié de 1876 à 1944. Il rapporte les détails de la journée de commémoration de la mémoire de Jules Ferry par les écoliers.
Source de l'image : Gallica.bnf.fr
« La fête des écoles, magistralement organisée par la Ligue française de l'enseignement, a remporté le vif succès qu'elle méritait, et cela malgré la pluie fine qui n'a cessé de tomber sur Paris au cours de cette journée pour laquelle on avait escompté un soleil un peu moins avare de ses rayons.
Il s'agissait, avant tout, de célébrer les noces d'argent de l'école laïque créée en France par le grand républicain Jules Ferry, dont notre collaborateur retraçait, hier, l'œuvre inoubliable. La Ligue de l'enseignement, par une heureuse inspiration, avait tenu à faire coïncider cette belle manifestation avec la pose de la première pierre du monument qui sera élevé à la mémoire du promoteur de l'école républicaine. N'était-il pas naturel qu'à cette occasion, les écoliers d'aujourd'hui, c'est-à-dire les hommes de demain, vinssent apporter un suprême hommage au grand Français qui ne craignit pas, au lendemain des pires désastres, de jeter les bases de l'école laïque, qui devait donner à la France démocratique des générations républicaines.
Dès une heure et demie, les quais de l'Hôtel-de-Ville, des Célestins et Henri-IV présentaient, malgré le mauvais temps, une fiévreuse animation. Les diverses sociétés, précédées de leurs bannières, de leurs fanfares, arrivaient successivement et allaient se réfugier sous les arbres. Les parapluies étaient, hélas de la fête mais, malgré cela, la bonne humeur ne perdait pas ses droits. On s'interpellait de quartier à quartier, d'arrondissement à arrondissement.
Le Tout-Paris scolaire était, en effet, massé là. On y voyait, en outre, nombre de sociétés de secours mutuels, d'associations d'enseignement populaire, de sociétés de préparation militaire, etc.
Le cortège s'organisa avec une discipline parfaite.
Pendant ce temps, dans les salons de l'Hôtel de Ville, il y avait grande réception. Le comité de la Ligue de l'enseignement présentait au conseil municipal les 421 enfants porteurs des listes de souscription au monument en tout deux millions de signatures représentant nombre de francs.
Les écoliers se redressaient avec fierté, serrant précieusement sur leurs poitrines les petits cartons rouges, contenant les desiderata de l'enseignement laïque. Plus d'un rougit lorsque M. André Lefèvre, président du conseil municipal, s'attarda dans les rangs pour tapoter une petite joue couleur de pomme d'api ou faire un compliment sur une mine éveillée.
Les enfants écoutèrent distraitement les discours que l'on prononça, ceux de M. Lefèvre et de M. Dessoye, président de la Ligue de l'Enseignement. Ce qui les préoccupait surtout c'était qu'ils allaient, tout à l'heure, marcher en tête du cortège. Il y avait bien la pluie qui allait abîmer leurs beaux habits du dimanche, mais ils ne paraissaient guère y songer.
Monsieur Lefèvre, qu'entouraient M. Armand Bernard, secrétaire général de la préfecture de la Seine, et M. Laurent, secrétaire général de la préfecture de police, fit l'historique des luttes qui aboutirent à la fondation de l'enseignement laïque. Énumérant ensuite les efforts de la Ville de Paris pour seconder l'œuvre entreprise par la Ligue de l'enseignement, il termina ainsi :
« Nous savons que les défiances, les hostilités, les armes rôdent encore autour de l'école laïque. Ses adversaires n'ont pas désarmé. Ils caressent le rêve d'une impossible revanche. La Ligue de l'enseignement, qui fut depuis un quart de siècle la conscience même de la démocratie républicaine. se doit de veiller sur les conquêtes réalisées. Nous les considérons comme indispensables. A vous, messieurs, de les préserver de toute atteinte !»
Le discours de M. Dessoye fut ensuite un hommage à la Ville de Paris et au Conseil Municipal. Enfin, l'on donna le signal du départ. La foule des écoliers et des écolières, dirigés par leurs instituteurs et institutrices, descendit l'escalier du palais municipal et déboucha sur la place de l'Hôtel-de-Ville. Au même moment, le canon de la tour Eiffel fit entendre sa voix de bronze, laquelle semblait déchirer les nuages accumulés sur la ville.
Le cortège se mit alors en marche dans le plus grand ordre, à défaut de silence.
Quatre heures de l'après-midi. La pluie, la maudite pluie, tombe toujours; le canon de la tour Eiffel tonne de plus en plus. On aperçoit le cortège qui s'avance lentement par la rue de Rivoli, vers les Tuileries où va avoir lieu, dans quelques minutes, la pose de !a première pierre du monument élevé, par souscription publique à Jules Ferry.
Le jardin est littéralement envahi par la foule.
Dans la grande tribune, qui peut contenir trois à quatre cents personnes, prennent place un grand nombre de personnalités politiques et de notables de l'enseignement. Nous remarquons, au premier rang, près de MM. Emile Loubet, Antonin Dubost et Mlle Dubost, Mme Jules Ferry et Monsieur Charles Ferry, veuve et frère de Jules Ferry, Mme Charles Floquet le général Dalstein, gouverneur militaire de Paris, Monsieur Lépine, préfet de police, Ferdinand Buisson, ancien président de la ligue de l'enseignement Siegfried, Joseph Reinach et le député Gasquet, directeur de l'enseignement primaire ainsi que les membres des comités de la Ligue de l'enseignement. On y rencontre également Charles Blondel, architecte du monument et Gustave Michel, statuaire, etc.
M. Dessoye, député de Chaumont, président de la Ligue de l'enseignement, préside la cérémonie. II est assisté de Monsieur Émile Loubet, ancien Président de la République et président d'honneur de la ligue, et Antonin Dubost, président du Sénat.
Bientôt il est procédé à la pose de la première pierre du monument.
M. Léon Robinet fait, tout d'abord, signer le procès-verbal de cette cérémonie par ceux qui vont y procéder. Puis M. Dessoye quitte la tribune, suivi des personnages officiels qui l'entourent et se dirige vers l'endroit où sera élevé le monument Jules Ferry.
L'architecte Charles Blondel présente alors la truelle et le ciment à Messieurs Émile Loubet, Dubost et Dessoye.
M. Émile Loubet scelle ensuite à l'aide d'un marteau la première pierre et M. Antonin Dubost, en riant, fait remarquer à M. Loubet qu'il est très compétent en la matière.
C'est forcé, répond l'ancien Président de la République. Pendant sept ans j'ai eu tant d'occasions de m'exercer à cela!
Enfin, M. Dessoye prend la parole. Après avoir retracé rapidement l’œuvre de Jules Ferry il donne rendez-vous aux personnes présentes pour l'inauguration du monument.
Comme M. Dessoye achève de parler, le président du patronage laïque du troisième arrondissement, suivi des membres du patronage, s'avance vers la tribune et s'écrie à haute voix
Nous en avons assez de nous faire mouiller ! Défilons et vive la République ! Le meilleur des discours, en somme !
Un grand concert débuta alors, suivi d'un départ de ballons et la Marseillaise retentit sur cette inoubliable journée !
Et voici ce qui est écrit dans L'Humanité du 21 novembre 1910 :
« L'inauguration officielle du monument élevé par souscription à Jules Ferry a eu lieu hier après-midi et n'a point manqué d'une certaine solennité. Autour de la statue trois tribunes avaient été édifiées. M. Fallières, les présidents du Sénat et de la Chambre, le président dut Conseil, des ministres, de nombreux personnages politiques et les membres de la famille occupaient l'une de ces tribunes. Les deux autres avaient été réservées à des délégations scolaires parmi lesquelles on remarquait tout particulièrement celle des écoles vosgiennes comprenant 250 garçonnets ou fillettes porteurs de brassards tricolores et tenant à la main une branche de sapin nouée d'un ruban aux trois couleurs.
Après la Marseillaise, exécutée par la garde républicaine et écoutée debout par tous les assistants, les élèves-maîtresses de l'école normale d'institutrices de la Seine et les élèves de l'École normale supérieure de Fontenay-aux-Roses ont chanté la Marche troyenne de Berlioz, accompagnée par la musique de la garde républicaine. Les discours commencèrent alors. Au nom de la Ligue de l'enseignement, M. Dessoye prit d'abord la parole.
M. Antonin Dubost, qui lui succéda, retraça toute la vie politique de Jules Ferry. Puis l'Aventurier, qui pensait, d'évidence, beaucoup plus à sa propre carrière qu'à celle de Ferry, prononça une sorte de plaidoyer personnel dans lequel, il eut le toupet de s'apparenter aux grands républicains en s'efforçant, sous couleur de louer l'opportunisme, d'expliquer sa propre, ou plutôt sa malpropre évolution ! Après son maître, M. Maurice Faure évoqua l'œuvre scolaire de Jules Ferry. On entendit les élèves des écoles normales qui chantèrent l'Hymne à la Liberté.
Un homme d'assez haute taille vêtu de noir, coiffé d'un chapeau haut de forme, passa à travers la haie formée par les agents et les municipaux et arriva jusqu'auprès du président du Conseil. Il saisit M. Briand par le col de son pardessus et tenta de le frapper au visage. Le président du Conseil perdit un instant l'équilibre ; son chapeau roula à terre. L'homme fut appréhendé, entraîné par les agents, tandis qu'il recevait maints horions au passage. Le président du Conseil qui n'avait pas été atteint alla prendre sa place dans la voiture présidentielle qui attendait rue de Rivoli.
L'agresseur fut conduit au commissariat du Marché Saint-Honoré, où il fut interrogé par MM. Lépine, Touny, Guichard, Roy, et d'autres personnages solennels. Il déclara se nommer Lacour, être âgé de 30 ans et exercer la profession de menuisier. II avait pu pénétrer aux Tuileries avec une carte d'invitation au nom de Petit. Edmond Lacour, qui est patron menuisier, demeure 3, rue Vezal, au Panthéon. il se borna à dire qu'il se refusait à donner des explications sur son geste et qu'il avait agi suivant sa conscience. Lacour a été envoyé au dépôt dans la soirée. Lacour est, dit-on, connu dans les milieux royalistes comme un actif militant. Il aurait été plusieurs fois arrêté au cours de manifestations politiques. »
Image lelab.europe1.fr
Le mardi 15 mai 2012, c'est devant le monument à Jules Ferry que François Hollande a choisi de prononcer son discours d'inauguration de la fonction présidentielle. Suscitant une vive polémique, il a tenu à préciser : « Je n'ignore rien de ses égarements politiques. Sa défense de la colonisation fut une faute morale et politique. Elle doit à ce titre être condamnée ». Ajoutant : « C'est donc empreint de cette lucidité indispensable que je suis venu saluer le législateur Ferry qui conçut l'école publique, le bâtisseur de cette maison commune qu'est l'école de la République ».
Je souhaite aux écolières, aux écoliers, aux étudiants et aux professeurs et aux parents une excellente rentrée !
Merci pour vos charmants messages et vos pensées d'amitié... Je pense également beaucoup à vous...
40 commentaires -
Par maplumefee le 14 Février 2015 à 01:57
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